Interview
du délégué général du CICR pour
l’Afrique, Christoph Harnisch
Afrique
subsaharienne : les défis auxquels est confronté le
CICR
L’Afrique
subsaharienne continue d’occuper une place considérable
dans les activités du CICR puisqu’elle compte pour
plus de 40 % du budget terrain annuel de l’institution. L’action
du CICR porte autant sur les conflits de longue date que sur ceux,
plus récents, qui agitent des régions comme le Darfour,
dans l’ouest du Soudan. De tous
les continents, l’Afrique est celui où les conflits
sont actuellement les plus nombreux, des conflits qui infligent
d’indicibles souffrances aux populations civiles concernées.
Le CICR mène des opérations dans 29 pays d’Afrique
subsaharienne, où il emploie quelque 500 expatriés
et 3 500 collaborateurs locaux.
« L’un des dilemmes auxquels nous
sommes toujours confrontés est celui des besoins immenses
au regard de nos possibilités d’action », déclare
le délégué général du CICR pour
l’Afrique, Christoph Harnisch. « Nous devons sans cesse
nous demander quelle est l’opération humanitaire la
plus utile pour les personnes les plus vulnérables dans les
situations les plus catastrophiques. En effet, le CICR pourrait
mettre en place des opérations encore plus importantes sur
tout le continent africain, mais nous devons nous concentrer sur
le mandat qui nous a été conféré et
sur nos possibilités. »
Christoph Harnisch précise que les priorités
actuelles sont l’Afrique occidentale, où la situation
reste extrêmement instable, et le Darfour, dans l’ouest
du Soudan, où les tensions entre le gouvernement central
et les groupes rebelles locaux ont dégénéré
en une situation de violence l’année dernière.
Cela dit, la situation s’est stabilisée dans une grande
partie du continent, bien que subsistent des problèmes fondamentaux
tels que la pauvreté chronique et des différends au
sujet de l’accès à des ressources limitées.
L’éventualité de nouvelles flambées de
violence est d’ailleurs élevée.
Afrique occidentale
Le Libéria, qui sort d’une guerre civile
de 14 ans à laquelle la population a payé un lourd
tribut, reste une source de préoccupation constante. En 2004,
le CICR y a étendu ses activités : les programmes,
auparavant axés sur l’assistance aux populations déplacées
dans la capitale, Monrovia, et ses environs, visent maintenant à
venir en aide aux habitants de l’intérieur du pays.
En coopération avec la Croix-Rouge nationale du Libéria,
l’institution concentre ses activités sur la protection
des civils et des personnes détenues, la remise en état
des installations d’approvisionnement en eau et d’assainissement,
et le rétablissement des liens familiaux.
Le processus politique est également très fragile
en Côte d’Ivoire voisine. Bien que les hostilités
aient cessé grâce aux efforts diplomatiques, il reste
encore des obstacles majeurs à surmonter sur la voie d’une
paix durable.
Darfour
À
la suite de discussions avec le gouvernement, à Khartoum,
le CICR a renforcé sa présence dans la région
du Darfour.
« Il est important de relever que
l’ampleur des besoins humanitaires doit encore être
évaluée avec précision, car nous ne prétendons
pas connaître tous les besoins de l’ensemble de
la population de cette région, fait remarquer Christoph
Harnisch. Le CICR a posté ses équipes aux côtés
de celles du Croissant-Rouge soudanais dans trois zones : al-Geneina,
al-Fashir et Nyala et il intensifie actuellement les distributions
de secours non alimentaires en faveur des personnes déplacées.
« Nous fournissons également une assistance médicale
aux hôpitaux de référence de ces régions
et nous avions déjà entamé, fin septembre,
des opérations dans les domaines de l’approvisionnement
en eau et de l’assainissement.
« En outre, nous veillons à ce que les civils soient
protégés dans toutes les zones où nous
assurons une présence… La composante « protection
» de notre action est donc tout aussi importante –
si ce n’est plus – que la composante « assistance
». |
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La Situation au Darfour en
Août 2004 (NDLR)
Darfour, Camp d'
Abshok pour personnes déplacées. Centre de nutrition
©ICRC
Les communautés déplacées et dispersées
dans les camps et les villes du Darfour continuent de refuser de
retourner chez elles ou même de s’installer dans les
camps périphériques, car elles ne sont pas sûres
d’être en sécurité. Leurs conditions de
vie se détériorent à mesure que la saison des
pluies avance, les fortes précipitations posant de graves
problèmes en matière d’abris et d’hygiène
et entravant l’arrivée des secours. Dans de nombreuses
régions, les routes et même les aéroports sont
impraticables. Plus de 80 délégués expatriés
et 315 employés locaux sont mobilisés pour l’opération
du Darfour.
Améliorer
la situation dans certaines régions (suite)
Dans certaines parties du continent africain, on peut être
relativement confiant en l’avenir. Christoph Harnisch indique,
par exemple, que la situation en matière de sécurité
s’est nettement améliorée au Rwanda, bien que
le pays éprouve les plus grandes difficultés à
assumer son passé récent.
« Le cas de l’Angola prête
plutôt à l’optimisme. Nous pensons que la guerre
est définitivement terminée, mais la situation dans
le pays prouve combien il est difficile de sortir d’un conflit.
Les problèmes non résolus persistent, l’argent
manque et les tâches que doit assumer le gouvernement sont
parfois plus complexes que celles auxquelles il était confronté
pendant la guerre. »
Les
conditions en Angola sont telles que le CICR a pu étendre
son réseau de bureaux de recherches pour permettre aux familles
de reprendre contact avec des proches portés disparus. Il
a par ailleurs renforcé le soutien qu’il apporte aux
programmes de prévention contre les dangers des mines et
des munitions non explosées.
La
communication devient un outil essentiel
Comme d’autres organisations humanitaires,
le CICR est confronté à plusieurs défis
dans l’accomplissement de son mandat en faveur de ceux
qui sont emportés dans la tourmente des conflits armés
en Afrique. La sécurité et la mise au point d’opérations
à grande échelle pour les populations africaines
sont des préoccupations prépondérantes.
La communication en est une autre.
«
Je crois que nous n’avons qu’une vue partielle de
la façon dont nous sommes perçus en Afrique, déclare
Christophe Harnisch. Le CICR est parfois considéré
comme une organisation blanche et riche. |
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L’une de nos priorités est donc de remettre
en question la perception que nous avons de nous-mêmes et
de mieux comprendre les opinions des Africains, tout particulièrement
celles des victimes qui n’ont pas vraiment eu l’occasion
d’être entendues par des organisations internationales
comme le CICR. »
La communication deviendra donc un outil opérationnel de
plus en plus important pour le CICR en Afrique à mesure qu’il
s’efforce de mieux préciser son identité et
de se distinguer des autres organisations humanitaires pour mieux
répondre aux besoins des victimes des conflits armés.
© CICR 2003
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