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Dlamini-Zuma à la Commission de
l'UA : une victoire, à quel prix ?
Par
Jeune Afrique
L'Union africaine (UA) a réussi à doter sa
Commission, organe-clé de l’institution, d'un président en nommant la
Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma. Cette élection permet à l'Afrique
d'effacer le catastrophique échec de janvier et d'afficher une unité
retrouvée. Elle devrait également laisser de profondes cicatrices.
La nouvelle présidente élue de la Commission,
Nkosazana Dlamini-Zuma, a prêté serment dans la nuit du lundi 16
juillet, lors de la clôture du 19e sommet de l'Union africaine (UA).
L’ancienne ministre de l’intérieur sud-africaine était suivie des
Commissaires de sa nouvelle équipe, élus plus tôt dans la journée.
L'élection de Nkosazana Dlamini-Zuma est inédite à plusieurs titres.
Pour la première fois, une femme accède à la présidence de la
Commission, organe exécutif de l'UA. Pour la première fois aussi, le
poste échoit à une grande puissance continentale, celles-ci s'abstenant
jusqu'ici de postuler conformément à une loi non écrite.
Enfin, autre première, la présidence de la Commission et sa
vice-présidence, où a été réélu le Kényan Erastus Mwencha, sont toutes
deux occupées par des anglophones. Lors du précédent sommet, le
président sortant, le Gabonais Jean Ping, n'avait pu réunir les 2/3 des
suffrages requis au quatrième tour, où il était statutairement seul en
lice après avoir devancé Nkosazana Dlamini-Zuma au tour précédent.
Déjouant les pronostics, l'ex-épouse du président sud-africain Jacob
Zuma a cette fois mené le scrutin de bout en bout et réuni la majorité
qualifiée au 4e tour. « Elle est sortie en tête au premier tour et a
ensuite profité de l'élan. Les chefs d'État voulaient une décision », a
expliqué à Addis Abeba Jakkie Cilliers, de l'Institut pour les Études
de sécurité (ISS). Le président en exercice de l'UA, le Béninois Thomas
Boni Yayi, a lui salué une victoire de « l'Afrique toute entière ».
Goût
amer
Tout le monde n’était pas de cet avis, ce succès laissant même un goût
amer à certains. « On peut parler de victoire pour l'Afrique, parce que
nous avons avancé », a expliqué le vice-ministre kényan des Affaires
étrangères Richard Onyonka, dont le pays soutenait la candidature de
Jean Ping. « Mais pour nous, il s'agit d'une victoire
aigre-douce. Cette élection a créé une profonde division au sein de
l'UA et ce n'était pas nécessaire », a ajouté M. Onyonka, « très gêné
par les méthodes et le style de l'Afrique du Sud ». « Ils avaient le
droit de présenter un candidat (...) mais il y a eu trop
d'intimidation, de torsions de bras et de menaces » de la part des
Sud-Africains, afin de s'assurer la victoire, a-t-il dénoncé.
« Il y a quand même un soulagement » au sein de l'UA après l'élection,
note un diplomate occidental ayant requis l'anonymat. Mais la campagne
« très dure et offensive » menée par les candidats « va laisser des
traces et des rancœurs », surtout « si effectivement il y a eu des
pressions de la part des Sud-Africains », a-t-il ajouté.
Il est trop tôt pour évaluer les conséquences sur l'UA de cette
élection, note ce diplomate. Le scrutin semble avoir créé une scission
entre petits et grands pays, mais aussi entre francophones et
anglophones.
« Cela prendra du temps avant que nous mesurions les conséquences » de
l'arrivée de Mme Dlamini-Zuma à la tête de la Commission, a confirmé
Richard Onyonka, tout en s'interrogeant sur les intentions de l'Afrique
du Sud.
« Pourquoi l'Afrique du Sud a-t-elle eu une attitude aussi acharnée
envers cette élection? Quel est l'objectif de l'Afrique du Sud envers
l'UA? (...) « Viennent-ils avec une stratégie consistant à contraindre
les pays africains à exprimer la position sud-africaine? », a-t-il
poursuivi.
Ambition
africaine ou plus large?
Le vice-ministre s'est aussi demandé si l'ambition de Pretoria, déjà
membre du G20, des Brics (groupe de puissances émergentes) et qui
postule à l'éventuel futur siège permanent de l'Afrique au Conseil de
sécurité de l'ONU, était africaine ou plus large.
Nkosazana Dlamini-Zuma s'est crue lundi soir obligée devant la presse
de « faire le serment de (sa) loyauté » à l'Afrique et d'assurer
qu'elle travaillerait pour « l'intérêt du continent dans son ensemble ».
L’influence, notamment économique, de l’Afrique du sud le
continent et le fait qu'elle ait fait fi de la règle non-écrite de la
non-candidature des principales puissances continentales à la
présidence de la Commission, font craindre que Pretoria n'utilise le
poste que pour imposer ses vues et servir ses intérêts. « Les divisions
guériront » et Nkosazana Dlamini-Zuma « sera une présidente ouverte »,
assure Jakkie Cilliers. Son élection a surtout apporté, selon lui, « de
la clarté sur qui est aux commandes », après six mois de blocage.
Juillet
2012
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