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L’Europe et l’Afrique
par Jean-Christophe Ploquin
Les ministres de l’intérieur de l’Union européenne discuteront mardi 8 octobre d’immigration, après le naufrage de Lampedusa.
L’émotion
est palpable en Italie après le drame de Lampedusa. Beaucoup moins dans
le reste de l’Europe, alors que la noyade de centaines de migrants
jeudi dernier au large de cette île devrait interpeller toutes les
consciences – ce à quoi s’attache le pape François. Ces naufragés,
originaires pour la plupart d’Érythrée et de Somalie, s’étaient
arrachés à leur terre pour trouver, coûte que coûte, un avenir
meilleur. Or c’est la mort qui attendait la plupart des passagers
– seuls 155 ont pu être sauvés. De telles tragédies surviennent
régulièrement dans les eaux de la Méditerranée, souvent loin des
regards. Cette fois, la proximité de la côte et le nombre
impressionnant de victimes relance la question de l’immigration au sein
de l’Union européenne.
Vu du Sahel, de la Corne de l’Afrique ou du centre du continent
africain, l’Europe est un eldorado qui attire. Les Européens ne le
perçoivent pourtant pas ainsi, pâtissant d’un chômage important,
constatant l’effritement des systèmes sociaux, s’inquiétant pour leur
pouvoir d’achat. Taraudés par une extrême droite qui joue partout de la
peur de l’immigrant, les États du Vieux Continent ont rehaussé les
murs, durci les conditions d’octroi des visas, reportant en outre la
responsabilité d’endiguer le flux sur les États frontières de l’espace
Schengen. Cette politique de fermeté contraint les migrants à passer
par des filières dangereuses, à se glisser dans des brèches comme celle
de Lampedusa, île plus proche de la Tunisie que de la Sicile.
Si elle veut éviter de nouveaux drames et considérer dans leur dignité
ceux qui veulent l’atteindre même au péril de leur vie, l’Union
européenne peut agir à plusieurs niveaux : tenir un message positif sur
les migrants ; améliorer les structures d’accueil sur son sol et la
solidarité entre États membres ; renforcer les moyens de surveillance
et de secours en Méditerranée ; agir dans les pays de transit contre la
mafia des passeurs ; s’engager dans des politiques de développement
durable sur le sol africain. Cela exige un regard attentif sur ce
continent si proche, dont trop de gouvernements se désintéressent.
L’Europe, vieillissante, et l’Afrique, en pleine expansion
démographique, ont pourtant des destins liés.
6
Octobre 2013
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