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Le réveil africain Par Tayeb Belghiche
L’Afrique
change. Elle évolue si rapidement que sur le plan économique, les
experts prédisent qu’elle sera la prochaine locomotive de l’économie
mondiale. Mais c’est surtout sur le plan politique qu’elle marque des
points qui lui valent le respect de la planète.
La semaine passée, à la suite d’un procès qui a
duré plusieurs semaines à Dakar, l’ancien dictateur tchadien, Hissène
Habré, a été condamné par un tribunal pénal africain à 25 ans de prison
pour «meurtres», «viols», «crimes contre l’humanité» commis à l’époque
où il dirigeait le Tchad d’une main de fer. C’est la première fois
qu’un tel événement a lieu en Afrique. Et il faut croire que ce n’est
qu’un début.
Depuis les indépendances africaines, au début des années 1960,
l’Afrique a été le théâtre de coups d’Etat récurrents qui ont empêché
son développement. Les militaires avaient le vent en poupe grâce à la
protection des anciennes puissances coloniales. Que l’on se rappelle du
fameux Jacques Foccart, conseiller de l’Elysée pour les affaires
africaines et malgaches. Il faisait et défaisait les gouvernements dans
l’Afrique francophone et son réseau serait actif jusqu’à ce jour, même
si lui est passé de vie à trépas.
Rares étaient les dictateurs à être inquiétés parce que, tout
simplement ils étaient liquidés par leurs successeurs, putschistes
comme eux. Il y a eu des exceptions. Idi Amin Dada avait trouvé refuge
en Arabie Saoudite, laquelle donnera plus tard asile à un autre
prédateur, le Tunisien Zine El Abidine Ben Ali ainsi qu’à sa femme
Leila.
A la suite de la création de la Cour pénale internationale (CPI),
celle-ci a jugé ou lancé des mandats d’arrêt internationaux surtout
contre des anciens criminels africains. C’était suffisant pour les
dictatures africaines de crier au racine et à la discrimination. Cela
n’a pas empêché la CPI de faire merveilleusement son travail, et c’est
peut-être grâce à son existence que les apparentis-sanguinaires ne se
manifestent pas trop, à l’image de l’ubuesque Omar Al Béchir du Soudan
qui montre rarement son nez en dehors de son pays.
Pour enlever tout prétexte aux malfrats au pouvoir à travers le
continent, l’Afrique s’est donc dotée elle aussi de son propre
tribunal, une prise en main de son destin qui ne peut que lui créer des
sympathies. Elle a déjà donné l’exemple avec l’Union africaine.
Contrairement à la défunte OUA qui se voilait la face à chaque coup
d’Etat, aux violations des droits de l’homme, aux épurations ethniques,
l’UA s’est montrée très soucieuse quant au respect des peuples et pour
la légalité.
Elle a désormais en horreur les putschs et n’hésite pas à sanctionner
et à suspendre les pays où ils ont lieu. L’Egypte l’a appris à ses
dépens lorsque le maréchal Al Sissi a écarté du pouvoir le président
Mohamed Morsi. Même si des usurpateurs du pouvoir se manifestent ça et
là, une société civile est en train de voir le jour et n’hésite pas à
exprimer son mécontentement comme au Congo-Kinshasa par exemple, où le
Président en place cherche à briguer un 3e mandat alors que la
Constitution ne l’autorise que pour deux. Elle est loin l’époque quand
le défunt René Dumont écrivait que «l’Afrique noire est mal partie».
5 Juin 2016
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