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Burkina Faso : ce qu’il faut retenir du discours d’Emmanuel Macron Par Jeune Afrique - 28 novembre 2017 à 17h33 — Mis à jour le 28 novembre 2017 à 18h11
Assassinat
de Thomas Sankara, lutte contre le terrorisme, migration, éducation...
pendant plus de deux heures, le président français Emmanuel Macron
s'est adressé aux étudiants de l'Université de Ouagadougou, pour la
première étape de sa tournée africaine. Retour sur les points clés de
son intervention.
• Promesse de déclassification des archives françaises sur Thomas Sankara
Tous les documents que la justice voudra consulter (…) seront ouverts et transmis
Emmanuel Macron a choisi d’ouvrir son discours en rendant hommage à
Thomas Sankara, sous les applaudissements des étudiants de l’Université
de Ouagadougou. Le président français a promis, à l’occasion d’un
point presse au sortir de son tête-à-tête avec le président Marc
Roch Christian Kaboré, que les documents jusqu’ici classés
secret-défense sur l’assassinat de l’ancien président burkinabè seront
déclassifiés et que la justice burkinabè pourrait y accéder.
En réponse à la question d’un étudiant, il a affirmé s’être engagé à ce
que « tous les documents produits par administration française pendant
le régime de Sankara et après son assassinat soient déclassifiés pour
être consultés en réponse aux demandes de la justice burkinabè. (…) Ce
qui veut dire que tous les documents que la justice voudra consulter
(…) seront ouverts et transmis. »
Interrogée par Jeune Afrique, Mariam Sankara, la veuve du président
burkinabè dont l’assassinat en 1987 n’a toujours pas été élucidé, a dit
sa satisfaction à cette annonce. « Nous souhaitions la
déclassification de ces archives depuis longtemps. C’est donc une bonne
chose, mais nous attendons maintenant de connaitre le contenu de ces
documents et de voir quelle sera la suite de la procédure », a-t-elle
déclaré.
• Défense de l’intervention française dans le Sahel
Vous ne leur devez qu’une chose aux soldats français : les applaudir !
Confrontée à des problèmes de financement, la force militaire du G5
Sahel, qui doit compléter la Mission de l’ONU au Mali
(Minusma) ainsi que l’opération Barkhane, stagne et tarde à se mettre
en place. « Nous devons accélérer le travail de coopération avec le G5
Sahel, a affirmé le chef d’État français. Les premières expériences ont
été faites avec succès. Je veux que nous puissions désormais conduire
les premières victoires pour terrasser les terroristes. Ce sont des
organisations régionales plus fortes qui ont vocation à prendre le
relais contre le fardeau du terrorisme. Il faut renforcer les forces
régionales crédibles et réactives. C’est le sens de l’histoire »
Le budget de fonctionnement de la force G5 Sahel – estimé à 423
millions d’euros – est pour l’instant loin d’être bouclé, malgré
la promesse des États-Unis de contribuer d’avantage.
Emmanuel Macron a également profité de son intervention pour saluer le
bilan de son prédécesseur en matière de lutte contre le terrorisme. «
La France a été à vos côtés et je salue la décision de François
Hollande d’intervenir au Mali. C’était la bonne décision. La France a
été aux côtés de l’Afrique comme l’Afrique a été aux côtés de la France
», a-t-il affirmé, rappelant au passage que la France, comme le Burkina
Faso, « ont été meurtris par le terrorisme islamiste ».
Un sujet qui a aussi valu à l’un des étudiants, qui
l’interrogeait sur le déséquilibre entre le nombre de visas
étudiants et le nombre de soldats français présents au Sahel, une
réponse cinglante : « Vous ne leur devez qu’une chose aux
soldats français : les applaudir ! », a lancé le président français,
visiblement agacé par la question.
• Crise migratoire : « Une crime contre l’humanité »
Qui sont les trafiquants ? Ce sont les Africains mon ami ! Et nous les combattons avec vigueur !
Suite à la diffusion du reportage de CNN qui a démontré l’existence
d’un marché aux esclaves en Libye et provoqué l’indignation mondiale,
le président français avait qualifié ces ventes de « crimes contre
l’Humanité ». Des propos qu’il a réitéré lors de son discours à
Ouagadougou. « La tragédie de ce que j’appelle les routes de la
nécessité, (..) le pire désastre de notre histoire partagée, il faut le
nommer pour agir avec force ». Emmanuel Macron a également annoncé
qu’il proposerait mercredi à Abidjan, à l’occasion du sommet Union
africaine-Union européenne, « une initiative euro-africaine pour
mettre un terme à la stratégie des terroristes et des trafiquants
d’armes. »
Interrogé sur le sujet après son discours par une étudiante, le
président a cette fois réagi plus sèchement : « Qui sont les
trafiquants ? Ce sont les Africains mon ami ! Et nous les combattons
avec vigueur ! » avant d’ajouter : « Arrêtez de dire que le
problème c’est l’autre ! Présentez-moi un passeur belge, français,
allemand ou que sais-je encore ! Vous n’en trouverez pas ! »
• Franc CFA: « Je suis favorable à ce qu’on en change le périmètre »
Il ne faut pas avoir une approche bêtement anti-impérialiste
Concernant la devise monétaire ouest-africaine, Emmanuel Macron a
estimé que le franc CFA nécessitait quelques ajustements. « Le franc
CFA n’a plus le bon périmètre (notamment avec la présence du Nigeria).
Mais je sais que ça donne de la stabilité monétaire. Il ne faut pas
avoir une approche bêtement anti-impérialiste », a-t-il expliqué devant
les étudiants de l’Université de Ouagadougou. Le président français
s’est dit « favorable à ce qu’on en change le périmètre et peut-être
même le nom » .
« Si le président Kaboré veut sortir de la zone franc, il peut le faire
quand il veut ! (…) Dès qu’il aura fini de réparer la climatisation… »
a encore ajouté Emmanuel Macron, moquant le départ précipité du
président burkinabè, Roch Marc Christian Kaboré, qui a quitté la salle
quelques instants auparavant dans l’incompréhension générale.
• Jeunesse, éducation et mobilité : « Multiplier les partenariats, les échanges, les formations croisés »
Je veux que ceux qui sont diplômés en France puissent y revenir aussi souvent qu’ils le souhaitent
C’était un des axes prioritaires de la visite d’Emmanuel Macron,
« faire évoluer la perception de la France par la jeunesse
africaine ». « Le changement, le renouveau générationnel,
dans un continent comme l’Afrique, ce n’est pas une option, c’est une
loi mathématique », a-t-il martelé lors de son discours.
Le président français a affirmé que les membres du Conseil
présidentiel pour l’Afrique, créé fin août , seront « en lien
constant avec la jeunesse africaine pour en restituer la voix ».
Ce Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA ), se veut un
« outil de concertation et d’aide à la décision directement
rattaché au président », expliquaient les services de la
présidence française lors de son lancement.
Il a également annoncé la création d’une « maison de la jeunesse
africaine », dont il a promis l’ouverture « avant le 14
juillet prochain ».
Au sujet de la mobilité des jeunes diplômés, le président français
a défendu une politique d’échange plus large. « Je veux que ceux
qui sont diplômés en France puissent y revenir aussi souvent qu’ils le
souhaitent grâce à des visas de circulation longue durée », a-t-il
affirmé, plaidant également pour « multiplier les partenariats,
les échanges, les formations croisés, les doubles-diplômes qui nous
permettront d’apprendre l’un de l’autre ».
« Je souhaite que plus de jeunes Français puissent venir
travailler en Afrique (…) en privilégiant les candidats qui parlent ou
ont commencé à apprendre une langue africaine », a-t-il encore
ajouté.
• Démographie : « Je veux qu’en Afrique, partout, une jeune fille puisse avoir le choix »
Quand vous voyez des familles de 6, 7, 8 enfants par femme, êtes-vous sûrs que cela soit le choix de la jeune fille ?
Interrogé sur la démographie en Afrique début juillet, à l’occasion du
G20, Emmanuel Macron avait déclenché une polémique en parlant problème
« civilisationnel » quand certaines femmes « ont 7 à 8 enfants ». « Sa
mention de la démographie du continent est caricaturale et je ne
partage pas l’idée que, si on investit des milliards d’euros, nous
n’obtiendrons aucun résultat », avait alors jugé, dans une interview à
Jeune Afrique, Jean-François Kobiané, démographe à l’université de
Ouagadougou, au Burkina Faso, et directeur de l’Institut supérieur des
sciences des populations (ISSP).
Lors de son discours à Ouagadougou mardi, le président français est
revenu sur la question en déclarant : « Quand vous voyez des familles
de 6, 7, 8 enfants par femme, êtes-vous sûrs que cela soit le choix de
la jeune fille ? Je veux qu’en Afrique, partout, une jeune fille puisse
avoir le choix ».« C’est une conviction profonde qui m’a poussé à faire
de l’égalité femme-homme une grande cause de mon mandat. La démographie
peut être une chance mais à condition que chaque femme puisse choisir
son destin » a-t-il ajouté.
28 Novembre 2017
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