Pour préserver le climat mondial, il faut une politique énergétique adaptée
Par Eberhard Rhein Traduction française de Ludivine Odoni






Les décideurs politiques devraient arrêter de parler de « politique climatique ». C'est la politique énergétique qui est essentielle en matière de préservation du climat mondial. Cette dernière devrait assurer notre approvisionnement énergétique sans pour autant bouleverser l'environnement. Fournir une énergie à bas prix figure encore trop souvent parmi les priorités.


Les climatologues nous ont déclaré, convaincus, que les Hommes doivent cesser toute émission de gaz à effet de serre bien avant la fin du siècle, afin de maintenir des conditions de vie saines sur Terre. Autrement dit, ils doivent mettre fin à la consommation d'énergies fossiles, notamment du charbon, entre 2050 et 2100. Cette approche n'est pas contraire à notre perception. Afin d'atteindre cet objectif, les Hommes doivent donc commencer dès aujourd'hui et faire face au difficile processus de transition qui vient tout juste de commencer.



Le secteur énergétique, qui vit essentiellement des ressources fossiles, considère que cet objectif est impossible à atteindre. Le Conseil Mondial de l’Énergie (CME), l'organisation principale en matière d'énergie mondiale, s'attend à ce que la demande énergétique mondiale continue d'augmenter de 27 à 61 pour cent jusqu'à 2050 et à ce que les énergies fossiles soient la principale source, satisfaisant de 50 à 77 pour cent de la consommation énergétique mondiale. Ce scénario, bien que plausible dans le monde de l'industrie, n'est pas viable et les décideurs politiques devraient l'admettre ouvertement.

Afin d'être compatibles avec les contraintes climatiques et environnementales qui se multiplient rapidement, tous les états doivent établir des politiques énergétiques visant à : réduire la demande énergétique au maximum ;

•    satisfaire la demande restante à l'aide d'énergies renouvelables.

Il s'agit d'un réel défi dont, pour la plupart, nous ne prenons pas conscience. Il incombe tout particulièrement aux pays prospères affichant des taux d'émissions de CO2 par habitant élevés de s'en préoccuper.

Il devrait être possible d'économiser jusqu'à 50 % de l'énergie actuellement consommée en adoptant des habitudes de consommation plus vertes et en assurant une meilleure efficacité énergétique. De plus, la politique énergétique devrait viser à empêcher que la demande ne continue d'augmenter. Les États-Unis et l'Union Européenne ont commencé à agir dans ce sens en fixant des normes d'émission et d'efficacité du carburant plus strictes pour les automobiles et les bâtiments. Cependant, ils doivent redoubler d'efforts et tous les états doivent suivre ces normes, la Chine tout particulièrement.

Hydrogen Central Heating Station

Une meilleure efficacité énergétique est de loin la solution la moins coûteuse pour réduire la consommation d'énergie et les émissions de carbone. Elle permet de réduire le coûts internes comme les coûts externes. Plus les coûts énergétiques sont élevés, plus il est rentable d'investir dans l'efficacité énergétique. Afficher des prix de l'énergie élevés incite efficacement à réduire la consommation et à augmenter l'efficacité énergétique. Subissant la pression des entreprises et des consommateurs, les décideurs politiques sont réticents à taxer l'utilisation d'énergies fossiles, et même à éliminer les subventions attribuées à ces énergies.  Au lieu de plaider en permanence pour des prix bas en matière d'énergie, les décideurs politiques devraient se projeter dans l'avenir et s'interroger sur le moment où les prix de l'énergie fossile seront nettement plus élevés à cause des coûts de production et de la demande croissants. Projeter une augmentation des prix du gaz, du pétrole et du charbon a un impact sur les perspectives de profits des investisseurs et les encouragent à investir dans l'efficacité énergétique plus qu'il ne le feraient en extrapolant les niveaux de prix actuels.



L'échange des quotas d'émission peut aider dans ce sens, mais il n'est pas une panacée, comme l'a révélé l'expérience européenne. Il est uniquement efficace lorsque les quotas d'émission créent des pénuries sévères. Sans quoi, les prix peu élevés du carbone encouragent l'utilisation du charbon peu coûteux. L'Union Européenne doit, le plus rapidement possible, prendre les mesures requises pour réduire le volume des quotas d'émissions et aspirer à une augmentation des prix du marché, en visant les 25 €/tonne de CO2 au lieu des 4 € actuels. C'est malheureusement plus simple à dire qu'à faire, à cause de l'inertie remarquable et des intérêts particuliers en place.



Les énergies renouvelables, notamment les énergies éoliennes et solaires, sont les seules ressources énergétiques durables. Lors des 20 dernières années, des progrès remarquables en matière d'amélioration de la technologie ont été réalisés et les coûts ont été réduits de manière significative. À tarif égal, l'énergie fossile, leader sur le marché pour l'implantation optimale, sera remplacée. Cependant, avec le taux de progression de ces dernières années, il faudra une éternité pour remplacer toutes les énergies fossiles, qui couvrent actuellement 85 pour cent de la demande énergétique mondiale. A défaut de régimes de subventions performants, le progrès risque d'évoluer trop lentement. C'est également le cas de l'UE qui vise à réduire ses émissions de CO2 de plus de quatre cinquièmes avant 2050. Tous les pays membres de l'AIE (Agence Internationale de l'Énergie) devraient développer des stratégies appropriées et servir de « pionniers » pour la communauté internationale.



C'est une véritable « révolution énergétique » qui nous attend. Les ministères de l'énergie méritent donc d'être les ministères les plus importants et de couvrir tous les problèmes d'ordre environnemental et climatique en rapport avec l'énergie, que ce soit l'électricité, l'industrie, le transport, la construction, l'agriculture ou la recherche énergétique.

Aussi longtemps que les décideurs politiques se concentreront sur des notions abstraites telles que les émissions de gaz à effet de serre, ils éviteront le réel problème politique qui consiste à éliminer les centrales électriques fonctionnant au charbon, au pétrole et au gaz au cours des 60-70 années à venir.

C'est pourquoi nous ne devons pas avoir de trop grandes attentes (sinon aucune) quant à la conférence internationale sur le climat qui aura lieu à Varsovie le mois prochain ou du pacte international sur le climat qui sera signé à Paris en 2015 et qui entrera en vigueur en 2020.
Nous avons assisté à ces spectacles de masse ces vingt dernières années sans déceler de progrès mesurables et les changements climatiques se sont accélérés plus qu'ils n'ont ralentis. Les chefs du gouvernement doivent faire des politiques énergétiques visant à la protection du climat leurs priorités. Dans le cas contraire, les générations futures auront de sérieuses raisons de leur reprocher leur totale irresponsabilité.



21 - 30 Septembre 2013

Visitez les Blogs d'Euractiv

Retour au Climat

Retour au Sommaire
INFORMATIONS SANS FRONTIERES
France
Europe
UniversitÈs
Infos
Contact