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Climat : difficile mise en œuvre de l’accord de Paris
Par Simon Roger
Comme
chaque année, les délégués des 195 pays membres de la convention-cadre
des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) sont
rassemblés à Bonn, en Allemagne, depuis lundi 16 mai, pour
une session de négociations techniques. Comme chaque année, le centre
de conventions de la cité rhénane va sortir de sa douce torpeur pour
dix jours d’interventions solennelles en assemblée plénière et de
discussions serrées dans les salles annexes fermées au public et aux
médias. Comme chaque année, les délégués commenceront dès potron-minet
leur marathon quotidien par une séance de débriefing des avancées et
des blocages, enregistrés la veille.
Mais
cette session 2016 ne devrait pas ressembler à tous points de vue à la
précédente. Il s’agissait en 2015 de préparer une base de
négociations pour la conférence de Paris (COP21) et de se donner les
chances de conclure en décembre un accord universel permettant de
contenir le réchauffement sous le seuil de 2 °C. Cette tâche
particulièrement ardue a nécessité quatre sessions de travail, une à
Genève puis trois à Bonn.
Il importe cette fois de mettre en place un cadre de travail
fonctionnel après le compromis adopté le 12 décembre
au Bourget. Il faut désormais « assurer un équilibre de tous
les sujets qui doivent être traités et rendre opérationnel l’accord de
Paris », expliquent dans une note de réflexion commune, publiée
le 6 mai, la France, qui assure la présidence de la COP21
jusqu’en novembre, et le Maroc, qui lui succédera lors de la
conférence de Marrakech (COP22).
Ratification par la France
« La phase de négociation est derrière nous, nous entrons dans une
phase de collaboration, a dit à sa manière Christiana Figueres, la
patronne de la CCNUCC, en ouvrant les travaux de Bonn, lundi. Le monde
entier est uni derrière cet engagement. » « Les fondations
sont posées, à nous de construire maintenant notre maison commune, a
ajouté, dans un même élan d’optimisme, la ministre de l’environnement
française, Ségolène Royal. Je vous appelle à être des constructeurs et
des facilitateurs. »
« Vous devrez définir des règles et des mécanismes qui aideront
tous nos pays à mettre en œuvre l’accord de Paris, et à
transformer et développer leurs économies », a poursuivi la
présidente de la COP21, avant de regagner Paris, où doit être discuté,
mardi 17 mai, devant l’Assemblée nationale, le projet de loi
portant ratification de l’accord de Paris. Ségolène Royal devrait faire
un nouveau déplacement à Bonn en fin de semaine pour un bilan à
mi-session des négociations.
Le premier chantier est de constituer le groupe de travail chargé de
concrétiser l’accord de Paris, baptisé « APA », pour Ad hoc
Working Group on the Paris Agreement (« Groupe de travail ad hoc
sur l’accord de Paris »). Il sera animé par deux coprésidentes, la
Néo-Zélandaise Jo Tyndall et la Saoudienne Sarah Baashan, selon le
principe de l’équilibre Nord-Sud. Le groupe APA doit s’atteler
notamment au suivi des contributions nationales (pour lutter contre le
réchauffement climatique), au mécanisme de transparence qui permettra
de juger des efforts respectifs de chaque Etat et à la préparation d’un
premier grand bilan mondial, ou « Global Stocktake », prévu
en 2018.
Agir avant 2020
Les engagements nationaux pris à ce stade pour réduire les émissions de
gaz à effet de serre s’inscrivent dans une perspective
de 3 °C de réchauffement, bien au-delà de l’engagement pris
par la communauté internationale en décembre 2015 à Paris de
rester « largement sous les 2 °C ». Dans la dernière
synthèse des contributions nationales mise à jour le 2 mai,
la CCNUCC rappelle que les 189 pays (contre 161
en octobre 2015) qui se sont pliés à l’exercice représentent
près de 96 % des émissions mondiales. La convention-cadre
précise aussi que les plans d’action ne sont pas suffisants pour tenir
l’objectif de hausse des températures défini dans l’accord de Paris.
« Il a été annoncé aujourd’hui que le mois dernier avait été le
mois d’avril le plus chaud jamais enregistré ; ce qui signifie que nous
avons connu ces sept derniers mois des records de température, a
rappelé lundi à Bonn Teresa Anderson, de l’organisation non
gouvernementale ActionAid. Nous avons besoin d’une ambition bien plus
forte pour réduire radicalement les émissions, et d’un rythme bien plus
rapide dans la mise en place des stratégies nationales affichées. »
Sur la même ligne, le « Groupe des 77 + la Chine » ou
G77 (qui rassemble les 134 pays en développement et émergents) a mis en
avant l’importance d’agir avant 2020, date d’entrée en application de
l’accord, si le monde veut tenir ses objectifs. L’accord de Paris a
d’ores et déjà été signé par 177 Etats, dont 175 dès le jour où il
a été ouvert à la signature, le 22 avril à New York.
Seize Etats ont jusqu’à présent franchi l’étape suivante, celle de la
ratification. Les présidences française et marocaine de la COP
prévoient de consulter les délégués présents jusqu’au 26 mai
à Bonn sur l’hypothèse d’une entrée en vigueur de l’accord avant 2020,
possibilité ouverte si au moins 55 pays représentant au moins
55 % des émissions ratifient le texte.
Le dossier du financement devrait être également au cœur des
négociations de la CCNUCC en Allemagne. « Nous ne pouvons pas
trouver une réponse au dérèglement climatique sans une aide adaptée des
pays riches, a souligné le Maldivien Thoriq Ibrahim, président du
groupe de 44 petits Etats insulaires. La seule question est de savoir
si nous allons nous y mettre tous ensemble suffisamment vite et
fortement pour éviter la catastrophe. »
Salaheddine Mezouar, président désigné de la COP22 et ministre des
affaires étrangères du Maroc, a suggéré lors de l’ouverture des travaux
que les gouvernements et les institutions financières créaient un
« mécanisme accéléré » pour le financement du climat.
18 Mai 2016
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