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Climat : des résistances malgré l’urgence
Par Aude Massiot et Estelle Pattée
Alors
que 2016 a connu des températures records, les défenseurs de
l’environnement redoutent que l’arrivée de Trump et la baisse des
dépenses publiques françaises ne mettent à mal des années de lutte.
Le
constat des scientifiques est unanime : 2016 aura battu tous les
records de chaleur, pour la troisième année consécutive. Selon le
dernier bilan de l’Organisation météorologique mondiale, présenté fin
décembre, la température moyenne en 2017 devrait être supérieure
d’environ 1,2 °C à l’époque préindustrielle (1850-1900). Même discours
du côté de la Nasa et de l’Agence américaine océanique et
atmosphérique, qui n’ont cessé d’alerter sur les records de
températures. L’Arctique est la région la plus touchée. Elle a connu
ses douze mois les plus chauds depuis le début des relevés de
températures en 1900, avec 3,5 °C de plus qu’au début du siècle.
L’étendue de la banquise arctique de mi-octobre à fin novembre a été la
plus faible depuis 1979, date des premières observations.
Emballement
Face à ce constat assommant, quelques irréductibles défenseurs de
l’environnement tentent, tant bien que mal, de garder la tête hors de
l’eau. Pressés d’un côté par des administrations qui les voient de plus
en plus comme des ennemis (lire notre enquête), et de l’autre par une
planète dont l’état se dégrade à vue d’œil, associations, ONG et
scientifiques n’ont d’autre choix que de redoubler d’engagement (lire
notre décryptage). Le 4 novembre, l’accord de Paris sur le climat,
par lequel les pays signataires s’engagent à limiter le réchauffement
«bien en deçà de 2 °C», voire à 1,5 °C, est entré en vigueur. A ce
jour, 120 pays l’ont ratifié, parmi lesquels les plus gros
émetteurs de gaz à effet de serre, responsables du réchauffement,
Etats-Unis et Chine en tête. Encore faut-il que ces Etats respectent
leurs engagements, sans quoi la situation climatique pourrait se
dégrader rapidement.
Fin septembre, six scientifiques du monde entier, dont l’ancien
président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du
climat (Giec) Robert Watson, ont rédigé un rapport alarmant sur le
changement climatique. La température moyenne du globe, dit le rapport,
pourrait atteindre dès 2050 la fameuse limite des + 2 °C de
réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle. Au-delà de ce seuil
- un objectif politique gravé dans le marbre en 2009, à la
Conférence de Copenhague, mais déjà jugé insuffisant par les
scientifiques -, l’emballement du climat et ses conséquences (élévation
du niveau des océans, aggravation et fréquence accrue des sécheresses,
chute des rendements agricoles…) pourraient devenir incontrôlables.
Pour rester sous les 2 °C, insiste le rapport, il faudrait viser
l’objectif de «zéro émission net» de CO2 d’ici 2060 à 2075.
C’est-à-dire parvenir à un équilibre entre les émissions de gaz à effet
de serre et leur absorption par les puits de carbone (forêts et océans
captent 50 % des émissions anthropiques de CO2), grâce au développement
des énergies renouvelables, à un changement radical de nos modes de
consommation ou en stoppant la déforestation.
Sanctuarisation
Le tournant, au niveau mondial, est mal engagé. Surtout depuis
l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche, milliardaire
climatosceptique en cheville avec l’industrie fossile. Mais les
climatologues américains s’inquiètent surtout de l’entourage du
président élu. Plusieurs membres de son administration et de son équipe
de transition ne croient pas à l’impact des activités humaines sur le
changement climatique. «Pendant les mandats de George W. Bush, les
pressions sur la recherche sur le climat étaient déjà très grandes,
mais il s’agissait surtout de limiter la liberté d’expression des
climatologues, notamment à la Nasa», détaille Valérie Masson-Delmotte,
paléoclimatologue et coprésidente d’un groupe de travail du Giec. Pour
Kim Cobb, elle aussi paléoclimatologue, mais outre-Atlantique : «Là,
c’est très différent : les personnes qui devraient elles-mêmes
encourager et financer les recherches sur le changement climatique n’y
croient pas !»
En réponse, Barack Obama, craignant de voir son héritage
environnemental et climatique englouti par les bulldozers de
l’administration Trump, s’est lancé dans une campagne de
sanctuarisation du patrimoine naturel américain. Le 20 décembre,
le président américain a interdit tout nouveau forage de gaz ou de
pétrole dans de vastes zones de l’océan Arctique et a protégé une
trentaine de sites coraux au large de la côte Atlantique. Il a aussi
fait de plusieurs territoires fédéraux des monuments nationaux,
notamment dans l’Utah et le Nevada. Pendant son dernier mandat, il en
aurait ainsi créé 29, protégeant 215 millions d’hectares.
En France, le président Hollande a exprimé, lui aussi, ses
préoccupations sur la question climatique. Dans ses vœux aux Français
pour 2017, il a proclamé sa volonté de faire respecter l’accord de
Paris. «La France ne laissera personne, ni aucun Etat, fût-il le plus
grand, remettre en cause cet acquis majeur de la communauté
internationale.» L’Hexagone n’est pourtant pas un havre de paix pour
les défenseurs de l’environnement. Depuis peu, certaines associations
et ONG ont vu leurs subventions publiques largement diminuer, voire
disparaître. Auvergne-Rhône-Alpes, Hauts-de-France, Ile-de-France,
Bretagne… Peu de régions sont épargnées
7 Janvier 2017
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