Un futur « plan climat » pour les 7 millions d’habitants du Grand Paris
Par LE MONDE | 10.04.2018 à 12h24 | Par Simon Roger

La Métropole, qui regroupe 131 communes franciliennes, a officialisé un vaste projet qui doit la conduire à la neutralité carbone d’ici à 2050.

Une salle de spectacles classée pour décor – le théâtre du Garde-Chasse aux Lilas, près de Paris –, l’intervention programmée du ministre de la transition écologique et solidaire, la distribution d’un projet détaillé en près de 550 pages : la Métropole du Grand Paris (MGP) n’a pas lésiné sur les moyens pour accompagner le lancement, lundi 9 avril, de son Plan climat air énergie.

Nicolas Hulot n’a finalement pas ouvert les débats, mais cette absence n’a pas entamé la détermination de l’équipe aux commandes de la MGP. La collectivité francilienne, créée le 1er janvier 2016 et encore peu connue du public de l’aveu même de son président Patrick Ollier, député Les Républicains des Hauts-de-Seine et maire de Rueil-Malmaison, s’implique dans la lutte contre le réchauffement et veut le faire savoir.

Objectif neutralité carbone

Empruntant le même chemin que la capitale, dont le plan climat air énergie a été adopté le 21 mars, la MGP rédige une feuille de route de long terme, avec pour objectif la neutralité carbone à l’horizon 2050. La démarche s’inscrit dans le cadre du plan climat de la France, dévoilé par Nicolas Hulot à l’été 2017, qui lui aussi vise zéro émission nette de gaz à effet de serre au mitan du siècle, dans le respect des engagements internationaux pris durant la COP21 pour contenir le réchauffement de la planète en deçà de 2 °C.
Le 8 décembre 2017, la nouvelle collectivité a validé à son tour son projet climat, qui touche aux trois grands domaines dans lesquels la métropole de 7 millions d’habitants et 131 communes a compétence : l’aménagement du territoire, le développement économique et la protection de l’environnement.

« Le document n’est pas gravé dans le marbre, il a un statut évolutif », a rappelé le vice-président de la MGP et maire des Lilas, le socialiste Daniel Guiraud. La Métropole prévoit de rassembler les citoyens, les associations, le monde de la recherche, les entreprises et les collectivités autour d’un vaste débat sur la transition énergétique, « GrandParis 2 degrés », qui devrait durer jusqu’à fin 2019 et se conclure par un « accord du Grand Paris pour le climat ».

Rénovation thermique du bâti

Elle espère accélérer à partir de 2020 la transformation de son modèle et se fixe un double objectif d’ici à 2050 : elle compte réduire de 50 % sa consommation d’énergie par rapport à 2005 et porter à 60 % la part des énergies renouvelables dans sa consommation (dont 30 % au moins produite localement). L’Ile-de-France est un mauvais élève en la matière puisque seulement 5 % de son énergie finale est renouvelable. Celle-ci provient de trois sources principales : la récupération de chaleur grâce à l’incinération de déchets ménagers, la biomasse et la géothermie.

Sur ce terrain, Paris va plus loin et ambitionne d’être 100 % énergies renouvelables au milieu du siècle. Mais la capitale devra notamment, pour y parvenir, déployer des champs photovoltaïques et éoliens. « À l’échelle de la métropole, la complexité des enjeux est plus grande », souligne Marianne Louradour, la directrice Ile-de-France de la Caisse des dépôts et consignations, pour qui « son poids économique et démographique, la compétition avec d’autres villes-mondes actives dans la réduction des risques climatiques » sont des paramètres déterminants.
Aujourd’hui, 15 % de l’électricité nationale est consommée en Ile-de-France, alors que ce territoire produit très peu d’énergie. L’énergie consommée par la MGP est surtout dédiée à l’usage des bâtiments : 53 % pour les logements résidentiels, 38 % pour le tertiaire, et seulement 9 % pour l’industrie. « Nous importons déjà l’essentiel de notre énergie, confirme Daniel Guiraud, et cette tendance va se poursuivre compte tenu de l’intensification de la construction, de l’essor des réseaux de transports. » Le chantier de la rénovation thermique du bâti prend donc une place prépondérante dans le plan climat métropolitain.

Qualité de l’air et alimentation

Le projet contient par ailleurs un éventail de mesures destinées à améliorer la qualité de l’air. La métropole prévoit de respecter d’ici à 2024 les valeurs limites européennes pour l’ensemble des polluants, notamment le dioxyde d’azote (NO2) et les particules fines PM10, afin d’atteindre avant 2030 les niveaux recommandés par l’Organisation mondiale de la santé. Près de 1,4 million de Franciliens ont été exposés en 2016 à des concentrations anormalement élevées de dioxyde d’azote, note le document, qui classe les transports routiers et le chauffage au bois comme les deux premiers contributeurs aux émissions polluantes de NO2 et PM10.

La collectivité francilienne propose notamment d’instaurer une zone à basses émissions à l’intérieur de la ceinture de l’A86 autour de Paris. Elle promet aussi d’accélérer l’offre de vélos en libre-service (Vélib’ Métropole) et de veiller à la continuité des pistes cyclables.
Sur un tout autre volet, celui de l’alimentation, deuxième poste du bilan carbone de la métropole, elle veut lutter contre le gaspillage alimentaire, valoriser les biodéchets et inciter les acteurs de la restauration collective à s’engager dans la voie de l’alimentation moins carbonée, biologique et privilégiant les circuits courts.

Le président du Grand Paris ne s’en cache pas : « Nous voulons aller le plus vite et le plus loin possible, avec le peu de moyens dont nous disposons. » Le budget de la MGP, établi en 2016 autour de 65 millions d’euros, est sans commune mesure avec celui de Paris, de l’ordre de 8 milliards. « La métropole n’est pas là pour tout financer, elle va agir comme un catalyseur », avance Patrick Ollier. Le renforcement de ses compétences d’ici à 2020 devrait s’accompagner de moyens humains et financiers plus élevés. Mais l’élu compte surtout sur la mobilisation des acteurs privés pour concrétiser les ambitions du plan climat métropolitain.


8 Mai 2018

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