Mali : les forces françaises et maliennes sont entrées dans Tombouctou
Par Le Monde.fr avec AFP et Reuters
Soldats
français et maliens sont entrés lundi dans la cité historique de
Tombouctou, sans combattre et sous les vivats des habitants, après des
mois d'occupation par des insurgés islamistes qui ont brûlé un bâtiment
contenant de précieux manuscrits antiques avant de prendre la fuite.
"Il n'y a eu aucun coup de feu, aucune goutte de sang, même pas de
résistance passive avec des pièges", a déclaré le colonel français
Frédéric Gout, chef de l'opération héliportée sur Tombouctou. "Nous
sommes en train de gagner cette bataille", a asséné à Paris le
président français François Hollande. "Quand je dis nous, c'est l'armée
malienne, ce sont les Africains soutenus par les Français", a-t-il
précisé aussitôt.
Tombouctou,
à 900 km au nord-est de Bamako, est tombée après une manœuvre
conjointe, terrestre et aérienne, et le largage de parachutistes dans
la périphérie, avant l'entrée lundi après-midi d'une colonne de soldats
français et maliens en ville.
Les forces françaises et maliennes sont désormais déployées dans toute
la "boucle du Niger" entre les deux bastions islamistes de Tombouctou
et de Gao, tombé samedi, a annoncé l'état-major. La manœuvre conjointe
s'est déroulée avec un appui de patrouilles d'avions de chasse
français. Lundi soir, l'état-major a fait savoir que 25 islamistes
avaient été tués lors de la prise de Gao.
▪ Manuscrits anciens incendiés
Le maire de Tombouctou, Halley Ousmane, qui se trouve à Bamako, affirme
qu'un bâtiment abritant des manuscrits anciens a été incendié par des
islamistes. La chaîne britannique Sky news a tourné quelques images de
destructions dans l'Institut Ahmed Baba, qui abrite entre 60 000 et 100
000 manuscrits, selon le ministère malien de la culture. La gravité des
destructions et des vols éventuels n'est pas encore déterminée.
Sky News a également filmé deux salles sécurisées de l'institut,
censées abriter des documents précieux et dont les étagères sont
vides. Il est possible que ces manuscrits aient été mis à l'abri
des islamistes. Tombouctou a été la capitale intellectuelle et
spirituelle de l'islam en Afrique aux XVe et XVIe siècles et une
prospère cité caravanière.
▪ Craintes de représailles
Les combattants touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad
(MNLA) ont de leur côté annoncé, lundi, qu'ils contrôlaient la ville de
Kidal, dans le nord du Mali, désertée par leurs anciens alliés
islamistes. Ce mouvement, d'obédience laïque, se bat pour
l'autodétermination et l'indépendance du nord du Mali.
Contacté par Le Monde, un des porte-parole du mouvement, Moussa Ag
Assarid, a précisé que : "Le MNLA contrôle Kidal et des villes de la
région, notamment El Khalil, depuis lundi matin. Nos éléments sont à
l'intérieur de la ville et contrôlent les postes d'entrée. Ils n'ont
rencontré aucune résistance, mais les combattants restent prudents car
il pourraient y avoir une contre-offensive. Des opérations sont en
cours ailleurs."
Les autonomistes touareg ont assuré ne pas rechercher la confrontation
avec l'armée française ni avec la force africaine d'intervention, mais
vouloir "protéger les populations contre les exactions de l'armée
malienne". L'ONG Human Rights Watch (HRW) a d'ailleurs demandé lundi
aux autorités maliennes de prendre "des mesures immédiates" pour
"protéger tous les Maliens de représailles", évoquant "des risques
élevés de tensions inter-ethniques" dans le Nord, où la rivalité est
forte entre communautés arabe et touareg d'un côté, noire de l'autre.
▪ Conférence des donateurs
L'Union africaine (UA) pourrait débourser 45 millions de dollars sur
les 460 requis pour le déploiement de la force africaine au Mali, selon
un projet de déclaration des chefs d'Etat de l'UA réunis en sommet à
Addis-Abeba, publié à la veille d'une conférence des donateurs pour le
Mali.
Ce serait la première fois que l'UA financerait pour partie une
opération de maintien de la paix. Cinq millions de dollars seraient
également débloqués pour la restructuration de l'armée malienne.
Le manque de ressources financières et logistiques handicape
sérieusement le déploiement de la force africaine au Mali, dont
seulement 2 000 soldats ont pour l'heure été acheminés au Mali ou au
Niger voisin. Ces derniers jours, des diplomates estimaient par
ailleurs à 700 millions de dollars le besoin total en financement de la
force africaine et de l'armée malienne.
▪ L'Angleterre prête à fournir plus d'aide, pas l'Italie
Le Royaume-Uni, qui envisagerait, selon une source gouvernementale
citée par le Guardian, d'envoyer rapidement 200 militaires
non-combattants en Afrique de l'Ouest, dont quelques "dizaines" au
Mali, deviendrait alors le premier pays occidental à épauler la France
par une présence sur le terrain, même s'il ne s'agit que d'entraîner
les troupes des pays d'Afrique de l'Ouest chargées de prendre le relais
pour combattre les islamistes.
Le conseiller britannique chargé de la sécurité nationale, Kim Darroch,
s'est rendu lundi à Paris pour évaluer les besoins de la France. Lundi
déjà, le premier ministre David Cameron avait assuré M. Hollande que
Londres était "disposée" à aider davantage Paris au Mali. Le
Royaume-Uni est prêt à fournir une aide logistique, de surveillance et
d'information, et à participer à une éventuelle mission européenne
d'entraînement de l'armée malienne, a expliqué Downing Street.
Visite de François Hollande le 1er février 2013
Le Japon, lui, s'est engagé mardi à verser 120 millions de dollars pour
aider à stabiliser le Mali et le Sahel, quelques jours après la mort de
dix Japonais dans une prise d'otages en Algérie par des islamistes qui
disaient agir en représailles à l'intervention française au Mali.
L'Italie a en revanche renoncé à envoyer trois avions de soutien
logistique au Mali pour une durée de deux à trois mois, a indiqué lundi
Mario Monti. Le gouvernement de M. Monti, démissionnaire, n'a pas
réussi à obtenir un soutien suffisant des principaux partis italiens
pour que le Parlement enterrine cet envoi, a dit M. Monti lors d'une
émission à la télévision La7.
28 Janvier
2013
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