Centenaire de la Guerre 14-18
Hommage aux troupes africaines
Par Guillaume Guguen
François
Hollande souhaite qu’aucun Français impliqué dans la Guerre 14-18 "ne
soit oublié" des commémorations qui se sont ouvertes jeudi. Mais
l'honneur rendu par la République aux troupes africaines reste timoré,
selon l'essayiste Charles.
Lancées depuis l’Élysée
par un discours solennel du chef de l’État, François Hollande , ce
jeudi 7 novembre, les commémorations du centenaire de la Grande Guerre
seront placées sous le signe de la cohésion nationale mais aussi de
l'amitié entre les pays ayant pris part il y a 100 ans au premier
conflit mondial (voir encadré ci-dessous). Pour la présidence, ce
"cycle mémoriel" est ainsi l’occasion de rendre hommage à tous ceux qui
ont combattu pour la France entre 1914 et 1918. "Aujourd’hui, je
souhaite qu’aucun des Français impliqués dans cette mêlée sanguinaire
ne soit oublié", a indiqué le président.
Lors de son discours, François Hollande a notamment salué les 430
000 soldats des colonies françaises "qui ont pris part à une guerre qui
avait pu ne pas être la leur". Certains historiens et observateurs
déplorent ainsi que la place de ces hommes dans la mémoire collective
soit réduite à la portion congrue. "Les troupes africaines ont
participé activement à la Première Guerre mondiale, leur contribution
fut déterminante, observe Charles Onana, journaliste-essayiste
français, auteur de "La France et ses tirailleurs" (éd. Duboiris,
2003). Or, à part dans les villages et les campagnes où ils étaient
présents, le grand public n’en a pas toujours conscience. Bien souvent,
j’ai pu me rendre compte que les élèves, les étudiants, n’avaient
aucune idée de cet engagement."
Pourtant, durant les quatre années de ce sanglant conflit qui fit près
de 1,7 million de morts côté français, la puissance coloniale qu’est
alors la France aura appelé quelque 500 000 hommes du continent
africain à se battre aux côtés des 8 millions de soldats mobilisés en
métropole. Parmi ces combattants composant les rangs de ce qu’on
appelle alors l’Armée coloniale se trouvent 175 000 Algériens, 40 000
Marocains, 80 000 Tunisiens et 180 000 Subsahariens, plus communément
appelés "tirailleurs sénégalais".
"Pas de reconnaissance plus forte que celle de la connaissance"
Comme pour faire écho au discours du président pour qui "il n’y a pas
de reconnaissance plus forte que celle de la connaissance", Charles
Onana plaide pour un meilleur enseignement de cet aspect de la Grande
Guerre dans les salles de classe. "Le devoir de mémoire induit un volet
académique qui consiste à faire entrer cette contribution africaine
dans les manuels d’Histoire, affirme l’essayiste. Il est important, non
pas de mentionner, mais de raconter l’histoire de ces hommes pour faire
reculer l’ignorance et battre en brèche des comportements
réactionnaires. Les jeunes sauraient alors qu’au moment de la guerre,
il y avait une solidarité entre les frères d’armes et que personne ne
se préoccupait des distinctions raciales."
Pourquoi alors un tel manque d’empressement à aborder ce chapitre du
conflit ? "C’est une partie de l’Histoire de France qui est ignorée car
elle est liée au fait colonial, qui a du mal à être abordé sans
susciter de malaise", constate Charles Onana. Alors que les questions
d’intégration et d’identité nationale agitent régulièrement la classe
politique hexagonale, la France aurait, selon l’écrivain, tout intérêt
à davantage aborder, "calmement, sans préjugés et sans passion", cette
union "Noirs-Blancs-Beurs".
"La connaissance de la participation des troupes africaines ou d’hommes
comme Blaise Diagne, député français du Sénégal et ami de Georges
Clemenceau, qui a permis à la France de recruter massivement des
tirailleurs sénégalais, pourrait permettre d’instaurer un climat de
concorde, insiste Charles Onana. Notamment auprès des jeunes qui
rencontrent aujourd'hui des problèmes identitaires et éprouvent des
difficultés à entretenir des relations apaisées avec la République."
Ce jeudi, le président français, dans une anaphore, sa marque oratoire,
n’a pas dit le contraire : "Commémorer, c'est savoir d'où l'on vient
pour mieux appréhender ce qui nous relie et nous fédère dans une
nation, la nôtre. Commémorer, c'est renouveler le patriotisme, celui
qui unit, celui qui rassemble, qui n'écarte personne au-delà des
parcours, des croyances, des origines et des couleurs de peau.
Commémorer ce n'est pas seulement invoquer le passé ou le convoquer,
c'est porter un message de confiance dans notre pays.".
9 Novembre 2013
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