Accord historique sur le nucléaire iranien
Par L'EXPRESS
L'Iran
et les grandes puissances réunies à Genève ont conclu dans la nuit de
samedi à dimanche un accord qui permettrait de limiter le programme
nucléaire iranien à des activités uniquement civiles en échange d'une
levée partielle des sanctions économiques.
Après
quatre jours de négociations "difficiles" sur le programme nucléaire de
Téhéran, les grandes puissances et l'Iran sont parvenus à un accord au
milieu de la nuit de samedi à dimanche à Genève, apportant un espoir de
sortir d'une crise qui dure depuis plus de dix ans.
Il ne s'agit que d'un accord intérimaire qui doit être revu et
complété dans six mois, mais il est historique. Après 10 ans de vaines
tentatives, l'Iran et les grandes puissances ont conclu dans la nuit de
samedi à dimanche un "plan d'action" qui cantonne le programme
nucléaire iranien aux activités civiles en échange d'un allègement du
programme de sanctions.
Il aura fallu cinq jours de négociations marathon à Genève et d'un
blackout médiatique total sur le climat et l'évolution des tractations
avant que cet accord ne puisse être annoncé par la chef de la
diplomatie européenne Catherine Ashton. Elle était entourée du ministre
iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarifet des six chefs de
la diplomatie du groupe 5+1 (États-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni,
France et Allemagne).
Les points clés de l'accord
Selon la présidence américaine, l'Iran a accepté de cesser tout
enrichissement d'uranium "à plus de 5% et de démanteler les processus
techniques nécessaires pour enrichir à plus de 5%". Ce qui passe
notamment par l'arrêt de la construction de nouvelles centrifugeuses à
uranium.
Le pays s'est par ailleurs "engagé à neutraliser son stock d'uranium
enrichi à près de 20% en le diluant". Enfin, lran "interrompra sa
progression vers la mise en fonctionnement d'un réacteur dans son usine
(nucléaire) d'Arak qui produirait du plutonium".
La question de l'enrichissement est au coeur des inquiétudes des pays
occidentaux et d'Israël, qui craignent que l'uranium enrichi à 20% soit
utilisé par l'Iran pour obtenir de l'uranium à 90% pour un usage
militaire.
De leur côté, les membres du P5+1 consentent à un allègement des
sanctions "limité, temporaire, ciblé et qui pourra être annulé",
équivalant à quelque sept milliards de dollars et n'imposeront pas de
nouvelles sanctions pendant la fenêtre de six mois si l'Iran respecte
ses engagements". Concrètement "certaines sanctions sur l'or et les
métaux précieux, le secteur automobile et les exportations
pétrochimiques de l'Iran" vont être suspendues et l'Iran va pouvoir
débloquer 4,2 milliards de dollars environ, produits de sanctions sur
les ventes de pétrole iranien.
En revanche, la plupart des sanctions américaines, commerciales et
financières, resteront en vigueur dans les six mois à venir, comme les
sanctions décidées par le Conseil de sécurité de l'ONU.
Les réactions
Lors d'une intervention solennelle depuis la Maison Blanche, le
président américainBarack Obama a assuré que cet accord obtenu à
l'arraché "barre le chemin le plus évident" de la république islamique
vers une bombe atomique.
M. Obama a pris soin de qualifier cet accord intérimaire de six mois de
"première étape importante", soulignant les "énormes difficultés"
persistant dans ce dossier qui empoisonne la communauté internationale
depuis une décennie.
Son homologue iranien Hassan Rohani, réputé modéré et qui a lancé une
politique d'ouverture vers l'Occident depuis son électon en juin, a
salué une entente qui allait "ouvrir de nouveaux horizons". Son
ministre des Affaires étrangères, M. Zarif, a salué "un résultat
important mais (qui) est seulement un premier pas".
Divergence formelle ou réelle dans l'interprétation de l'accord, M.
Zarif a toutefois réaffirmé le "droit inaliénable" de son pays à
l'enrichissement d'uranium". Le texte de Genève contient une "référence
claire selon laquelle l'enrichissement va continuer", a-t-il martelé,
très applaudi par la presse et la délégation iraniennes venues en
nombre à Genève.
Succédant à M. Zarif devant la presse dimanche à l'aube, le secrétaire
d'Etat John Kerry a paru prendre son contre-pied. L'accord de Genève,
a-t-il insisté, "ne dit pas que l'Iran a le droit à l'enrichissement
(d'uranium), quoiqu'en disent certains commentaires d'interprétation".
M. Kerry, parrain de la reprise des négociations directes
israélo-palestiniennes, a également voulu rassurer Israël qui s'est
farouchement opposé ces dernières semaines à tout allègement des
sanctions contre l'ennemi iranien. Un accord nucléaire "complet rendra
le monde (...) les partenaires de la région et l'allié Israël plus
sûrs", a promis le secrétaire d'Etat.
Israël condamne un "mauvais accord"
Alors que les relations américano-israéliennes traversent une crise, M.
Kerry a affirmé qu''il n'y avait pas la moindre différence entre les
États-Unis et Israël sur l'objectif final qui est que l'Iran n'aura pas
de bombe nucléaire". La réaction de l'Etat hébreu ne s'est pas fait
attendre: le bureau du Premier ministre Banjamin Netanyahu a dénoncé un
"mauvais accord qui offre exactement ce que l'Iran voulait: la levée
significative des sanctions et le maintien d'une partie significative
de son programme nucléaire".
Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a salué pour sa part
l'accord de Genève sur le nucléaire iranien, qualifié d'"avancée
importante pour la sécurité et pour la paix". Cet accord "confirme le
droit de l'Iran à l'énergie nucléaire civile, mais exclut de sa part
tout accès à l'arme nucléaire", a ajouté le ministre, estimant que
Genève constituait une "première étape majeure".
24 Novembre 2013
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