Compte rendu
A Paris, une conférence pour tenter de sortir l'Afghanistan de l'impasse et de la guerre

Par Jacques Follorou et Natalie Nougayrède



La communauté internationale se penche, à nouveau, sur l'avenir de l'Afghanistan. Près de 80 délégations doivent se réunir, jeudi 12 juin, à Paris, dans le cadre d'une conférence destinée, notamment, à financer l'effort de reconstruction dans un pays toujours en guerre. La réunion sera ouverte en présence des présidents afghan et français, Hamid Karzaï et Nicolas Sarkozy, et du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. Elle rassemble des représentants de 65 pays et 15 dirigeants d'organisations internationales.


Les autorités afghanes ont annoncé, lundi 9 juin, qu'elles comptaient obtenir plus de 50 milliards de dollars, sur cinq ans, au terme de cette rencontre pour soutenir la Stratégie nationale de développement pour l'Afghanistan (ANDS), résumée par le gouvernement afghan dans un document qui a servi de base à l'organisation de cette réunion de Paris. En visite aux Pays-Bas, mardi 10 juin, M. Karzaï a assuré que son pays "aura besoin d'une aide étrangère pour assurer sa sécurité pendant au moins dix ans encore". Les Etats-Unis, par la voix de Patrick Moon, haut responsable du département d'Etat chargé de l'Afghanistan, ont souhaité, mardi, que la communauté internationale se mobilise.
 

La conférence internationale des donateurs pour la reconstruction de l'Afghanistan, organisée à Paris le 12 juin 2008, devait notamment insister sur la lutte contre la corruption.

Les organisateurs de la conférence, la France et les Nations unies, qui ont associé l'Allemagne et la Norvège, ont précisé que le montant final ne porterait que sur une période de deux à trois ans et ne correspondrait pas aux attentes déjà formulées. La dernière réunion de ce type, à Londres, en 2006, avait permis de collecter 10,5 milliards de dollars de promesses de dons.

Le ministère des affaires étrangères français insistait, pour sa part, sur le fait que cette rencontre "n'était pas qu'une conférence économique et financière, mais aussi politique". Les Français s'efforcent d'en élargir le champ, pour en faire une "conférence de réflexion", selon les termes du ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner, alors que la France doit dépêcher, cet été, un bataillon de 700 hommes dans la province de Kapisa, au nord de Kaboul. Pour le représentant spécial des Nations unies en Afghanistan, Kai Eide, "la conférence de Paris va au-delà des promesses de dons des bailleurs (...) nous chercherons à forger un nouveau pacte entre le gouvernement afghan et la communauté internationale".

Pour la France et les Nations unies, en particulier, la conférence de Paris doit être le lieu d'une évaluation de la stratégie internationale dans ce pays depuis 2002 et de l'efficacité de l'aide massive envoyée en Afghanistan depuis la chute du régime taliban. "La communauté internationale doit fournir une assistance beaucoup plus cohérente (...) et le gouvernement afghan doit approfondir et amplifier le processus de réformes économiques et politiques tout en affichant une plus grande responsabilité et en intensifiant ses efforts pour combattre la corruption", détaille M. Eide.

Parmi les écueils de l'Afghanistan, selon l'ONU, figure aussi le manque de coordination entre Occidentaux dans la lutte contre la drogue. Ce point doit être abordé lors d'une réunion ministérielle de l'OTAN cette semaine.

ésents en Afghanistan, aimeraient profiter de cette conférence pour tenter d'infléchir la logique à forte dominante militaire encore défendue par les Etats-Unis. L'idée d'une "afghanisation" accrue des efforts de sécurité et de développement devrait donc être le thème dominant mis en avant à Paris. Mais cela soulève la question de ce qui peut être obtenu, en retour, de M. Karzaï, un an avant l'échéance présidentielle afghane. Une élection qui le fait hésiter à bousculer des réseaux et des intérêts bien établis. Sur le plan de la stratégie militaire, les grandes lignes ont été fixées lors du sommet de l'OTAN de Bucarest, le 2 avril, notamment dans un texte établissant les objectifs. Des experts évoquent la probabilité d'une montée en puissance de l'armée américaine en Afghanistan, à l'horizon 2010, au rythme des réductions anticipées de troupes en Irak.

Juin 2008




A Paris, les donateurs internationaux multiplient les promesses d'aide pour l'Afghanistan

Plus de quatre-vingts délégations se sont réunies, jeudi 12 juin à Paris, dans le cadre d'une conférence destinée, notamment, à financer l'effort de reconstruction de l'Afghanistan, un pays toujours en guerre. Au-delà des promesses de dons, l'objectif de la conférence était également politique : "forger un nouveau pacte entre le gouvernement afghan et la communauté internationale", selon le représentant spécial des Nations unies en Afghanistan, Kai Eide.

Le président afghan, Hamid Karzaï, a présenté un ambitieux plan de développement de 50,1 milliards de dollars (32,5 milliards d'euros) sur cinq ans. Mais les organisateurs de la conférence, la France et les Nations unies, ont précisé que le montant final ne porterait que sur une période de deux à trois ans et ne correspondrait pas aux attentes formulées.

LES ÉTATS-UNIS, PREMIERS CONTRIBUTEURS

Les Etats-Unis ont promis une contribution de 10,2 milliards de dollars (6,6 milliards d'euros), qui doit encore être approuvée par le Congrès. Dans une moindre mesure, l'Allemagne a promis de verser 420 millions d'euros entre 2008 et 2010. Nicolas Sarkozy s'est engagé, quant à lui, à "doubler" l'aide française à la reconstruction du pays, promettant 107 millions d'euros sur cette même période. Cette aide devrait être consacrée en priorité à l'agriculture et à la santé. Le Japon, la Banque asiatique de développement et la Banque mondiale ont également annoncé des contributions pour un total de près de 3 milliards de dollars (1,9 milliards d'euros).

Le soutien à M. Karzaï a été assorti d'incitations à lutter contre la corruption. "L'aide internationale doit passer par les structures afghanes, qui devront répondre dans la transparence de l'utilisation de ces fonds et des résultats", a déclaré le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. La conférence doit ainsi se pencher sur les moyens d'impliquer davantage les Afghans dans la reconstruction de leur pays. Actuellement, 70 % de l'aide internationale ne passe pas par le gouvernement afghan.

Des ONG ont enfin appelé à ce que la réunion de Paris ne débouche pas sur de nouvelles promesses d'aides sans lendemain. Selon un rapport de l'Agence de coordination de l'aide à l'Afghanistan publié fin mars, les pays occidentaux n'ont fourni que 15 des 25 milliards de dollars d'aide promis depuis 2001, l'année où les talibans ont été chassés de Kaboul par les forces de la coalition emmenée par Washington. Autre critique adressée à l'égard des donateurs occidentaux : la priorité donnée à l'option militaire. Ainsi, pour 100 millions de dollars investis chaque jour dans les dépenses militaires, le pays ne reçoit que 7 millions de dollars d'aide humanitaire.


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