|
De la
Solitude à la Solidarité Rencontre avec Pablo Servigne
Dans
l'émission : « Le Temps est bon » d’Isabelle
Pierre sur France Inter le 23 Septembre 2018
Ce
jour-là le biologiste de 30 ans quitte le monde scientifique et
universitaire après avoir soutenu sa thèse sur les fourmis arboricoles.
Au même moment, la finance mondiale s’effondre. L’effondrement,
justement, celui de notre monde, une quasi réalité à laquelle le jeune
scientifique a décidé de s’attaquer.
A la fin de l’été 2008, la banque d’investissement Lehman
Brothers fait faillite et entraîne dans sa chute la bourse américaine
et toutes les bourses mondiales. Un an plus tôt, la crise des subprimes
avait déjà chassé de leurs maisons des centaines de milliers
d’Américains.
Sidéré par le livre
de Rob Hopkins
A la même époque, Pablo Servigne est encore dans son cocon,
« plongé jusqu’au cou dans la littérature scientifique et dans
l’écriture de ma thèse, comme si l’effondrement de l’économie en même
temps que celui de la biodiversité ne m’atteignait pas ». Et
pourtant, le chercheur a pris la décision, sitôt docteur, de
« se prendre le monde dans la figure ». Il s’engage
comme agronome dans l’éducation populaire à Bruxelles au sein
d’associations de l’économie solidaire et sociale, et découvre avec
enthousiasme le mouvement de la Transition initié par Rob Hopkins, un
enseignant anglais en permaculture, dont le livre vient alors de
paraître.
Hopkins défend une transition nécessaire et incontournable vers un
monde sans pétrole. Son but : faire prendre conscience à chacun du
pic pétrolier (la fin de la manne) et du changement climatique afin de
s'y préparer concrètement par des actions locales positives.
« C’est un mouvement joyeux qui propose un monde meilleur et pas
celui de Mad Max ! ».
De l’effondrement à
l’entraide
Pablo Servigne propose un véritable état des lieux. Celui d’une
civilisation hyper globalisée, interconnectée et vulnérable à la
moindre perturbation. Il a décrit dans ses livres (voir ci-dessous) les
liens reliant les crises entre elles : le dérèglement climatique,
le pic pétrolier, la destruction des organismes vivants et de leur
milieu de vie, la fragilité des systèmes financiers et économiques. Des
crises qui se nourrissent mutuellement et dont la réunion rend
l’effondrement probable.
Face à cette perspective, le premier réflexe, logique, ne serait-il pas
de passer de la dépendance à l’indépendance ? Certains groupes
humains s’y essaient en fabriquant des bunkers ultra équipés dans des
territoires isolés loin de toute nuisance (le survivalisme). Mais pour
le chercheur, le seul remède est l’entraide, innée chez l’homme, et qui
émerge lorsque l’environnement est hostile. «Rien n’est solitaire, tout
est solidaire », a dit Victor Hugo. Il faut donc « créer une
culture de la coopération et de l’altruisme » pour éviter
l’effondrement. Ses deux inspiratrices et héroïnes : Elinor
Ostrom, Prix Nobel d’Economie 2009 etJoanna Macy, militante écologiste
californienne et éco-psychologue. La première a repensé la gestion des
biens communs en démontrant que certains groupes étaient capables de
s’auto-organiser et de se fixer des règles pour gérer au mieux leurs
ressources. La seconde revendique l’interdépendance entre tous
les êtres vivants pour la sauvegarde de notre planète.
Pour aller +
loin :
La page de Pablo Servigne, c'est ici
Ses livres :
- Une autre fin du monde est possible. Vivre l'effondrement (et pas
seulement y survivre), co-écrit avec Gauthier Chapelle et Raphaël
Stevens, à paraître au Seuil le 18 octobre 2018
- L'entraide, l'autre loi de la jungle, co-écrit avec Gauthier
Chapelle, (Les Liens qui Libèrent, 2017)
- Comment tout peut s'effondrer. Petit manuel de collapsologie à
l'usage des générations présentes, co-écrit avec Raphaël Stevens (Le
Seuil, 2015)
- Petit traité de résilience locale, co-écrit avec Agnès Sinaï, Raphaël
Stevens et Hugo Carton (Ed. Charles-Léopold Mayer, 2015)
- Eloge des mauvaises herbes. Ce que nous devons à la ZAD, un ouvrage
collectif coordonné par Jade Lindgaard, (Les Liens qui Libèrent, 2018)
Et aussi :
- le site du Mouvement de la Transition en France, initiée en
Grande-Bretagne par Rob Hopkins au début de la décennie 2000
- La radio web la Planète Bleue
- La revue Le Crieur n°7 : Quand les ultra-riches se préparent au pire
(Juin 2017)
- Manuel de Transition. De la dépendance au pétrole à la résilience
locale, de Rob Hopkins (Edition Ecosociété, 2010)
- La gouvernance des biens communs : Pour une nouvelle approche
des ressources naturelles, d'Elinor Ostrom (De Boeck, 2010) et sur les
travaux du Prix Nobel d'économie 2009 : Elinor Ostrom ou la
réinvention des biens communs, un article de Hervé Le Crosnier (Les
blogs du "diplo", juin 2012)
- Ecopsychologie pratique et rituels pour la Terre, de Joanna Macy
(Editions Le Souffle d'Or, 2018)
Enfin à lire ou à relire :
- L'entraide. Un facteur d'évolution, de l'anarchiste russe Pierre
Kropotkine (Edition Ecosociété, 2005)
- La Grande Transformation, de Karl Polanyi (Gallimard "Bibliothèque
des Sciences Humaines", 1983) : un ouvrage écrit en 1944 et
traduit seulement 40 ans plus tard, et pour cause, la démarche de
l'économiste hongrois était novatrice et visionnaire, voire dérangeante
pour l'époque, associant : "l'histoire et l'anthropologie pour
démontrer que l'économie de marché est une construction
socio-historique et non un trait de la nature" (extrait du magazine
Sciences Humaines, 2003)
Les titres musicaux
diffusés à l'antenne :
Back to black, Amy Winehouse
(2007)
Les fourmis rouges, Michel Jonasz
( 1981)
Bonya, de Fatoumata Diawara (2018)
Les références du générique de l'émission : « Le Temps
est bon » d’Isabelle Pierre remixé par Degiheugi
Les invités
Pablo Servigneagronome et docteur
en biologie
Les références
L'entraide, l'autre loi de la
jungle écrit par Pablo Servigne, Gauthier Chapelle (Les Liens qui
Libèrent)
23
Septembre 2018
Ecoutez France Inter
Retour à la Culture
Retour au Sommaire
|
|
• INFORMATIQUE
SANS FRONTIERES • |
|
|