"J'sais pas quoi faire !", avouent 78 % des jeunes étudiants
Par Annie Kahn
Internet et les autres médias donnent l'impression que chacun dispose
de bien meilleurs moyens aujourd'hui qu'hier pour se tenir informé. Il
est néanmoins un domaine où cette assertion semble particulièrement
erronée : l'orientation professionnelle.
Selon une enquête réalisée auprès de 1 000 jeunes Français par le
syndicat professionnel du conseil en recrutement Syntec, en partenariat
avec le Medef, 22 % seulement des jeunes interrogés savent dire
spontanément quel métier leur semble le plus accessible pour un premier
emploi.
Quand on leur demande de se projeter au-delà de leurs études
supérieures qu'ils viennent de choisir, leurs réponses sont très
limitées. Les étudiants en première année de droit se voient avocats,
journalistes ou magistrats, ceux qui entament des études de lettres
s'imaginent professeurs, et les élèves de classes préparatoires
scientifiques se destinent à être ingénieurs. "Réalisme ou panne
d'imagination ?", s'interrogent les auteurs de l'étude.
La multiplication des sites d'information, et les plateformes d'échange
et de discussions telles Facebook, LinkedIn, ou autres créations du Web
2.0 n'ont visiblement pas encore été mises à profits par les élèves des
lycées, ou leurs conseillers d'orientation, pour préciser un avenir
professionnel.
Incapables de définir avec précision le métier qu'ils aimeraient
exercer, les jeunes choisissent donc davantage une filière de formation
en fonction de l'intérêt qu'ils portent aux matières enseignées, plutôt
qu'aux compétences ou expertises qu'ils comptent en tirer pour être le
mieux armés possible dans la vie professionnelle, regrettent les
auteurs de l'étude. Cette attitude serait plus marquée pour les élèves
inscrits à l'université que pour ceux ayant opté pour un cycle d'étude
court ou une classe préparatoire.
"Laisserons-nous longtemps encore ces milliers de jeunes seuls face à
eux-mêmes s'engager dans un avenir déconnecté à ce point des réalités
du monde professionnel ?", s'inquiète le Syntec Recrutement, qui
exhorte ses membres à se mobiliser : "L'éducation nationale ne peut
assurer, seule, l'orientation des jeunes vers des parcours de formation
destinés à faciliter leur intégration à l'entreprise ; les acteurs de
l'emploi doivent y contribuer davantage."
L'enseignement de l'économie au lycée, outre qu'il permettrait aux
jeunes de mieux comprendre la marche du monde, pourrait aussi leur
donner une vision plus concrète de l'entreprise et de ses métiers.
Selon un sondage TNS Sofres, réalisé pour le Conseil pour la diffusion
de la culture économique (Codice), publié le 20 novembre, 73 % des
Français estiment "avoir besoin de plus de connaissances en économie
pour réussir".
Certes, la guerre des talents à laquelle se livreraient les entreprises
du monde entier pour recruter les meilleurs esprits est passée au
second plan depuis l'éclatement et la propagation de la crise
économique. Les plans de réduction d'effectifs ont désormais pris le
pas sur les campagnes d'embauches. Mais celles-ci pourraient revenir de
plus belle, prévoit le Syntec : "La crise passera, la pénurie
s'installe, elle, pour une longue période."
Avril 2009
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