Concert Historique à Pleyel
Par Bertrand Guay
PARIS
(AFP) - "Musicalement, ils sont très forts", admettent les musiciens de
l'Orchestre Philharmonique de Radio-France, en répétition avec
l'Orchestre Unhasu de Corée du Nord, première formation de ce pays à
jouer en Europe depuis 1953, sous la direction du Sud-Coréen Myung-Whun
Chung.
L'objectif: un concert commun mercredi à la Salle Pleyel à Paris.
Myung-Whun Chung est clair: "ce projet pour moi c'est le point de
départ d'un échange", déclare-t-il aux musiciens. "Un projet unique, ça
ne m'intéresse pas beaucoup." Sur la chemise noire du violon solo
nord-coréen, un badge à l'effigie du leader de la Corée du Nord, Kim
Jong-Un. Les membres de l'ambassade et les officiels nord-coréens venus
en accompagnateurs portent aussi ce signe distinctif. Les musiciens de
Corée du Nord sont jeunes et attentifs aux paroles du maestro. Rapide
leçon, Myung Whun-Chung enseigne aux musiciens comment dire "bonjour",
"merci", puis "un, deux et trois" en français et en coréen.
Amenés en bus à la salle de répétition, accueillis comme des stars par
une nuée de journalistes, les musiciens ont enchaîné d'une traite le 4e
mouvement de la première Symphonie de Brahms, au programme du concert
de mercredi. Une prestation vite récompensée par un "bravo" du chef,
emporté par son enthousiasme, qui s'est levé pour diriger debout la fin
du mouvement aux accents solennels. Svetlin Roussev, violon solo du
Philharmonique, originaire de Bulgarie, a la chance de parler russe. Il
avoue pouvoir communiquer ainsi sans problème avec des musiciens
nord-coréens qui ont étudié à Moscou. "Ils sont musicalement très
forts, très souples, ils apprennent vite, prennent le meilleur", dit-il.
Il s'émerveille que son compagnon de pupitre, Mun Kyong Jin, possède un
magnifique Stradivarius de 1716, la période d'or. Les autres musiciens
ont généralement de bons instruments, mais de facture moderne. "Ils
sont assez réservés. C'est une autre culture, une autre discipline, à
la dure. Rien ne dépasse", assure Svetlin Roussev. Mais, ajoute-t-il,
"je trouve que mon voisin est plutôt sensible". Une grande harmonie
musicale semble déjà régner entre les deux violons solos.
Séances photos devant La Joconde
Arrivés samedi de Pyongyang, les musiciens nord-coréens ont déjà eu
droit à deux sorties touristiques, dimanche au Château de Versailles,
puis lundi au musée du Louvre où ils ont pu, à leur grande joie, se
photographier les uns les autres devant le portrait de La Joconde. "Ils
ont trouvé la ville très belle, très bien préservée", assure une
traductrice nord-coréenne. Mais, selon le chef de la délégation, Hyok
Bong Kwon, seul habilité à communiquer au nom des artistes, "leur
esprit est très concentré sur le concert qu'ils vont jouer mercredi".
Il a remercié le gouvernement français et Radio-France qui ont organisé
ce concert conjoint, "un événement historique dans les relations entre
les deux pays", et insisté sur "une longue tradition de collaboration
culturelle entre la France et la Corée du Nord.
Interrogé sur la possibilité d'un concert commun entre musiciens de
Corée du Nord et de Corée du Sud, il a répliqué: "c'est une aspiration
de notre peuple". Au programme de mercredi, une première partie
consacrée à la musique nord-coréenne avec l'orchestre Unhasu et ses 75
musiciens, sous la direction des chefs nord-coréens. Puis, le "Rondo
Capriccioso" pour violon et orchestre de Camille Saint-Saëns, avec au
violon le Nord-Coréen Mun Kyong Jin. En seconde partie, la Symphonie
N.1 de Brahms sera interprétée par les musiciens des deux formations,
dirigés par Myung-Whun Chung, avant un dîner commun.
Mars 2012
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