Une valeur sûre ? La culture !
Par Nicolas Michel
Quand
ils entendent le mot culture, la plupart des dirigeants préfèrent faire
l'autruche plutôt que de sortir leur précieux chéquier. Et pourquoi
donc s'en aller donner de l'argent, chose sérieuse s'il en est, à des
saltimbanques rêveurs qui ne produisent rien de concret et peuvent bien
se nourrir d'amour et d'eau fraîche dans le monde désintéressé de l'art
pour l'art ?
Les
idées reçues servant souvent à colmater les brèches de l'ignorance sans
que personne n'y trouve à redire, l'espoir est mince que le rapport
conjoint rédigé par l'inspection générale des finances et celle des
affaires culturelles, en France, permette une révolution dans les
palais d'Afrique ou d'ailleurs. Mais comme les chiffres parlent à ceux
qui comptent et recomptent leurs gains à longueur de journée,
mentionnons tout de même quelques informations trébuchantes tirées
dudit rapport intitulé "L'apport de la culture à l'économie en France".
Il est vrai que le secteur culturel coûte cher à l'État. En gros, plus
de 13 milliards d'euros par an, auxquels il faut ajouter plus de
7 milliards d'euros consentis par les collectivités territoriales.
Un terrifiant gouffre financier, n'est-ce pas ? Mais non ! "Les
activités culturelles ainsi définies représentent en 2011 une valeur
ajoutée de 57,8 milliards d'euros, soit 3,2 % de la somme des
valeurs ajoutées de l'économie française, ce chiffre représentant
l'évaluation la plus proche de ce que l'on pourrait appeler le "PIB
culturel"."
Bien sûr, il est possible de gloser sur la méthode, d'ergoter sur ce
qui entre ou n'entre pas dans le vaste domaine du "culturel", mais le
chiffre de 57,8 milliards d'euros c'est l'équivalent en France du
secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire (60,4 milliards),
deux fois les télécommunications (25,5 milliards) et sept fois
l'industrie automobile (8,6 milliards). Ajoutons pour en finir
avec les chiffres que "le secteur à forte valeur ajoutée de la culture"
emploie rien de moins que 670 000 personnes et qu'il existe "une
corrélation positive entre les initiatives culturelles et le
développement local".
Certains pays ont compris tout ce qu'ils avaient à y gagner en termes
de revenus directs comme en termes d'image. Jeter un oeil du côté des
Émirats, où l'on patauge dans le pétrole et où l'on construit des
musées, permet de s'en convaincre. En Afrique, les exemples sont plus
rares, mais ils existent. Ainsi, s'il évaluait les retombées de ses
festivals et de sa politique en faveur du cinéma, le Maroc ne
regretterait sans doute pas ses investissements. Quant aux autres, ils
feraient bien de sortir la tête du sable.
27 Janvier 2014
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