François Hollande inaugure la Philharmonie de Paris, une semaine après les attentats
Par Libération
François
Hollande a inauguré mercredi soir la Philharmonie de Paris, destinée à
rivaliser avec les plus grandes salles mondiales, avec un hommage à la
culture «toujours menacée», une semaine exactement après l’attentat
contre le siège de Charlie Hebdo.
«C’est
la culture que les terroristes voulaient atteindre», a lancé le chef de
l’Etat, saluant dans la Philharmonie un projet «exceptionnel», «un
événement comme Paris n’en avait pas connu depuis un quart de siècle»,
avec l’inauguration de l’Opéra Bastille (1989).
Dans un pays ressoudé par les attentats, M. Hollande a été ovationné
par le public à son entrée dans la grande salle de 2.400 places. Les
concerts d’inauguration de mercredi et jeudi sont dédiés aux victimes
des attaques terroristes.
Seule fausse note, l’absence du concepteur du bâtiment, l’architecte
Jean Nouvel, qui a décidé, à quelques heures du coup d’envoi, de
boycotter l’inauguration. L’architecte star dénonce une ouverture
«prématurée» et évoque le «mépris» dont il aurait été l’objet pendant
la conduite du chantier qui a accumulé les retards, depuis son
lancement en 2006.
Mercredi soir, l’accès des invités et spectateurs payants s’est faite
sous haute surveillance mais sans accroc, alors que la veille encore,
le lieu était peuplé d’ouvriers maniant les perceuses.
L’Orchestre de Paris, qui donnait le concert de gala, a littéralement
«essuyé les plâtres» dans un bâtiment qui nécessitera encore plusieurs
mois de finitions et a vu son coût exploser de 200 millions d’euros
lors de son lancement en 2006 à 386 millions aujourd’hui.
Les spectateurs étaient visiblement séduits par l’architecture
audacieuse de la salle, à l’issue d’un premier concert dédié à la
musique française (Gabriel Fauré, Maurice Ravel, Henri Dutilleux et une
création de Thierry Escaich).
La plus grande salle classique de Paris donne un sentiment d’intimité
exceptionnel, avec ses lignes «enveloppantes», ses balcons flottants et
son orchestre placé au centre, mettant le spectateur le plus éloigné à
32 mètres du chef d’orchestre (48 m Salle Pleyel).
Sa construction a bénéficié des meilleurs acousticiens mondiaux, le
Néo-Zélandais Harold Marshall et le Japonais Yasuhisa Toyota.
Les tests acoustiques vont se prolonger plusieurs mois, et les
musiciens devront s’adapter à leur nouvelle salle. «On ne sait pas trop
si on doit jouer fort ou moins fort, on a nos repères à prendre»,
explique la flûtiste Florence Souchard-Delépine, tout en décrivant, «un
son aérien, une salle qui résonne et en même temps qui est précise».
«Il ne faudra pas juger l’acoustique au premier concert», a prévenu le
directeur de l’Orchestre de Paris Bruno Hamard pour qui «la
probabilité, c’est que le résultat sera très bon, mais qu’il deviendra
exceptionnel avec le temps».
Quelque 500 musiciens (deux orchestres résidents et trois formations
associées) «habitent» cette nouvelle maison de la musique, qui comprend
aussi six salles de répétition, 10 studios de travail, un café, un
restaurant, des ateliers pédagogiques et un espace d’exposition.
Un million de visiteurs attendus
Les détracteurs de la Philharmonie lui reprochent son gigantisme et sa
localisation excentrée dans un quartier populaire alors que le public
de la musique classique avait ses habitudes Salle Pleyel, dans le VIIIe
arrondissement huppé. Des «esprits chagrins», a lancé François
Hollande, saluant un lieu «pour toutes les musiques, tous les
répertoires, tous les publics».
«Le programme prévoit beaucoup d’actions pédagogiques en direction des
populations pas habituées à fréquenter des salles de musique
symphonique», a souligné la ministre de la Culture Fleur Pellerin.
La Philharmonie compte sur les week-end pour séduire un nouveau public,
avec des tarifs modiques, des concerts courts pour les familles, des
ateliers, des thèmes allant de la comédie musicale au hip hop en
passant par David Bowie, objet de la première exposition en mars.
Le premier week-end «portes ouvertes» propose de nombreuses
manifestations gratuites, dont une performance de 101 pianistes dirigés
par le Chinois Lang Lang, samedi.
Son président Laurent Bayle, qui attend un million de visiteurs «en
vitesse de croisière», devra jongler avec un budget plus contraint que
prévu: 30 millions d’euros au lieu de 36 initialement prévus, la Ville
de Paris ayant réduit sa contribution.
15 Janvier 2015
Abonnez-Vous à Libération
Retour à la Culture
Retour au sommaire
|