Le
Renouveau économique
Par
Gilles Marchand
Vouloir aujourd'hui systématiquement opposer
les tenants de l'ancien et du nouveau monde informatique est une
manière de résumer les joutes protocolaires actuelles
particulièrement contre productive.
C'est une vision qui simplifie, synthétise,
peut donner un éclairage semi-rationnel, mais c'est surtout
une façon faussée de lire l'actualité en évacuant
la réalité, une réalité qui est infiniment,
et c'est tant mieux, plus complexe que ce que semblent vouloir faire
dire certains.
Vouloir tout opposer en regard des anciennes valeurs car il y a
effectivement des valeurs qui aujourd'hui subissent une réactualisation
— mot affreux dans ce contexte — est une façon
de nier la complémentarité fondamentale entre ce qu'on
appelle le virtuel et la réalité qui aujourd'hui révèle
plus qu'elle ne transforme plusieurs hypothèses. Il y a bien
différents niveaux de réalité, mais vouloir
systématiser les relations d'affrontement, les logiques prédatrices
entre le hard et le soft, entre l'ancienne économie et la
nouvelle est une vision à court terme, réactive d'une
certaine manière, réactionnaire même, qui évacue
la sophistication réelle de mondes que nous opposons et qui
sont en définitive inextricablement enchevêtrés,
ce qui est une bonne chose. Il y a un maillage complexe et à
tous les stades, des relations, des interpénétrations.
Le phénomène d'ouverture s'exprime aussi à
ce niveau.
Nous ne sommes pas passés d'une économie ancienne
à une nouvelle économie selon des formules de développement
mues par une trop grande confiance puis d'une économie nouvelle
à un retour en arrière du au pessimisme ambiant face
aux implications humaines de tels changements, nous passons d'un
stade de développement à un autre stade de développement
faisant la part belle à toutes les formes possibles d'évolution
entrepreneuriale.
En somme l'économie ne peut être basée sur l'économie,
sur la permanente réduction des coûts de production
et sur la perpétuelle réduction du facteur humain,
mais doit être pensée dans le sens du développement
de la richesse et le "capital humain" — second vocable
insupportable — concoure pour une très large part
à la richesse des entreprises. C'est bien cette expérience
humaine, hors des travaux d'ergonomie manageriale, qui fait la richesse
des sociétés qui sont capables de développer
leurs atouts plutôt que de constamment rogner sur les budgets
humains. Cette myopie existe à tous les niveaux. Or les nouvelles
entreprises et les anciennes, présentes depuis toujours,
ou presque, ont besoin de savoir développer leur faculté
de prise en compte des facteurs réels d'évolution.
Sinon nous aboutiront à une perpétuelle négation
des valeurs humaines qui est préjudiciable au-delà
du strict champ économique. La logique de perpétuelle
concentration est une logique d'amenuisement qui aboutit pour part
à la situation d'actuelle de menace sur l'équilibre
de fonctionnement.
Pour sortir de cette menace il faut remplacer l'humain au centre
de l'entreprise. Qu'il en soit la valeur étalon. Une société
basée sur une hyper précarité stricte est une
société qui n'a pas d'avenir. Elle nierait son propre
avenir et ce qui est de l'ordre du nécessaire si elle négligeait
les facteurs qui peuvent lui permettre de sortir, ou de ne pas entrer,
dans la récession. Ce n'est bien sûr pas là
la seule orientation utile, mais elle est primordiale. A tous les
niveaux, la qualité des hommes fait la différence.
Bien sur leur capacité à évoluer, leur connaissance
de l'algèbre informatique est primordiale.
Il ne faut donc pas paniquer.
Il faut se mettre au travail. Ne pas se placer dans des perspectives
extrêmes. Ne pas non plus se placer dans un esprit de régression.
Sortir de l'appréhension, retrouver la confiance en soi et
dans les équipes auxquelles on est rattaché. C'est
dur pour vous, c'est dur pour un nombre large d'entre nous. Sachons
faire face. Partout faire affleurer les conditions d'une réorientation
constructive des professionnels afin que leur expérience
ne soit pas perdue. Voire une simple continuation de ce qui fonctionne.
On ne change pas une équipe qui gagne, un système
qui gagne. Quelle ne soit pas "démobilisée".
Ce serait là le but non avoué de certains esprits
obscurantistes qui remettent en cause la solidarité et l'esprit
d'initiative dont sont capables ceux qui font l'économie
au quotidien.
Aidez-vous les uns les autres. Aidez-vous vous-même. Soyez
votre propre mécène. Retrouvez le souffle. Réapprenez
à respirer. A organiser votre temps. A profiter de l'espace
de liberté qui se dégage. Faites plein de choses intéressantes
et ne vous laissez pas guider par une logique obscurantiste ou régressive
ou réductrice. Repartez. On croit qu'il n'y a parfois rien
à faire, que nous n'avons aucune marge de manœuvre.
Que le chômage est seul censé venir répondre.
C'est faux. Il n'y a jamais eu autant de travail à accomplir
pour qui sait se donner la peine de l'imaginer...
Juin 2006
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