La Chine parie sur les véhicules "verts" pour développer ses moyens de transport
Par Harold Thibault
L'Etat
chinois investit dans le développement de véhicules électriques et
hybrides. Seize entreprises publiques, dont trois constructeurs
automobiles, ont annoncé en août la formation d'une union afin de
"maîtriser le coeur de la technologie des véhicules électriques" et
créer des modèles compétitifs à l'international.
L'alliance
a été dotée de 1,3 milliard de yuans (150 millions d'euros), mais Pékin
pourrait investir 100 milliards de yuans jusqu'en 2012 dans ce secteur,
selon les médias officiels. L'objectif est de lancer 500 000 véhicules
hybrides ou purement électriques sur les routes au cours de chacune des
trois prochaines années. En parallèle, le gouvernement teste depuis
juin dans cinq villes, dont Shanghaï, l'efficacité d'une politique
d'incitation à l'achat de véhicules moins polluants. L'Etat finance 60
000 yuans (6 900 euros) pour l'acquisition d'un véhicule électrique ou
hybride et 3 000 yuans (347 euros) pour une voiture à essence économe.
Paul
Lin, porte-parole du groupe BYD - pour Build Your Dreams, "Construisez
vos rêves" -, constate depuis le lancement de cette politique une
"hausse significative des ventes". Le premier constructeur de batteries
chinois propose depuis décembre 2008 une voiture hybride, la F3DM et
doit commercialiser prochainement un véhicule purement électrique déjà
utilisé par 45 chauffeurs de taxi de la ville de Shenzhen, dont
certains se sont plaints dans la presse chinoise des difficultés de
chargement. Un de ses concurrents, Shanghai Automotive Industry
Corporation, doit lancer un modèle hybride d'ici décembre sous la
marque Roewe.
Le pays est devenu en 2009 le premier marché
automobile mondial, avec 13,6 millions d'unités vendues, un défi pour
l'approvisionnement en énergie et la protection de l'environnement. "La
Chine est confrontée, d'une part, à une question de sécurité
énergétique avec le pétrole et d'autre part, à la nécessité de
développer ses moyens de transport, relève Paul Lin, de BYD. A terme,
les véhicules électriques seront une solution intéressante, d'autant
que le marché est encore frais."
L'annonce
de plans d'aide étatiques renforce les ambitions des constructeurs.
Dongfeng, partenaire en Chine de Nissan et Honda, a indiqué qu'il
investira entre 400 et 500 millions de yuans pour lancer cinq modèles
électriques au cours des trois prochaines années.
Vélos électriques à Pékin
Malgré
cet emballement, les infrastructures ne suivent pas. Si BYD se félicite
de proposer son savoir-faire aux villes désireuses d'installer des
stations de chargement, les conducteurs doivent, pour le moment,
recharger les batteries chez eux. A Shenzhen, où le groupe a son siège,
on ne compte qu'une dizaine de bornes de chargement publiques. Et à
Shanghaï, si la construction de 400 stations a été annoncée, aucune
n'est en place.
Les Chinois sont déjà habitués à rouler à
l'électricité. A Pékin, les deux-roues à essence sont interdits en
centre-ville, où nombreux sont ceux qui optent pour le vélo électrique.
Mais là encore, le pari écologique est loin d'être gagné : la majorité
des 22,2 millions de vélos électriques produits en Chine en 2009
fonctionne grâce à une batterie au plomb, élément fortement toxique une
fois dispersé dans la nature.
Des chercheurs de l'université de
Tsinghua, à Pékin, et du laboratoire américain d'Argonne, dans
l'Illinois, s'interrogent sur l'opportunité pour la Chine de se tourner
massivement vers les véhicules électriques, dans un article publié en
mai par la revue Technologie et science environnementale.
Le
développement de ces véhicules, calculent-ils, va augmenter les
émissions de CO2 car 70 % au moins de l'électricité produite en Chine
sont issus de la combustion du charbon, la plus polluante des énergies
fossiles. Cette dépendance s'élève à 88 % dans les provinces dynamiques
de l'Est et à 98 % dans le Nord. Selon eux, avoir recours à des
véhicules électriques ne permettrait de réduire les émissions de CO2
que dans des régions utilisant un minimum de 35 % d'énergies non
fossiles. C'est-à-dire, à l'heure actuelle, uniquement dans les
provinces méridionales, qui utilisent 30 % d'énergie hydroélectrique et
5 % de nucléaire.
Septembre 2010
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