La transition énergétique est en marche !
Par Emmanuelle Réju
Dans
un rapport rendu public le 1er septembre, l’ONG World Wide Fund
met en scène les quinze signes de changement du système énergétique
mondial. Le secteur de la mobilité reste cependant à la traîne.
En
panne, l’accord de Paris sur le climat ? Oublié, l’élan de la COP21
vers un monde moins émetteur de gaz à effet de serre ? Ce n’est pas
l’analyse du WWF (World Wide Fund), qui a publié, le
1er septembre, un rapport sur les quinze signaux prouvant que la
transition énergétique au niveau mondial a bel et bien commencé.
« Ces évolutions ne sont pas dues à l’accord de Paris, précise
Pascal Canfin, directeur général du WWF France. À l’inverse, c’est ce
début de transformation du système énergétique mondial qui a rendu
possible l’accord politique. »
Les principaux indicateurs relevés par l’ONG concernent en premier lieu
le domaine de la production d’électricité, qui reste au niveau mondial
une source majeure d’émissions de gaz à effet de serre. Certes, le
moteur de l’économie mondiale fonctionne encore à une très large
majorité au charbon ou au gaz. Mais selon le WWF, le point de bascule a
été atteint ces deux dernières années : en 2015, les énergies
renouvelables (solaire, éolien, hydroélectricité) ont représenté
90 % des nouvelles capacités installées. Une proportion qui
s’élevait à 50 % en 2014. « La plupart des décideurs ignorent
encore ce renversement de tendance majeur », s’étonne Pascal
Canfin.
En 6 ans, baisse de 80 % des coûts du solaire
Cette évolution s’explique en partie par la diminution des coûts des
technologies solaires photovoltaïques, dont le rythme a surpris la
plupart des observateurs. Le prix des modules photovoltaïques a en
effet chuté de 80 % entre la fin 2009 et la fin 2015. La baisse
des prix devrait se poursuivre, « faisant à terme du solaire
photovoltaïque le mode de génération d’électricité le moins coûteux qui
soit », estime le WWF.
L’Afrique subsaharienne est d’ailleurs devenue en 2015 le plus grand
marché d’installations solaires domestiques hors réseau, avec
1,37 million d’unités vendues. Un record, qui reste à confirmer :
plus de la moitié de l’Afrique subsaharienne n’a pas encore accès à
l’électricité.
Des signes très encourageants en Chine
Dans les pays développés, le WWF a retenu deux chiffres symboliques. Le
8 mai 2016, les énergies renouvelables ont fourni 87,6 % de
la consommation énergétique des Allemands, engagés dans une transition
énergétique qui les conduira à terme à réduire leur dépendance au
charbon. Sur l’ensemble de 2015, les ampoules du Portugal ont
fonctionné à près de 50 % grâce à de l’électricité d’origine
renouvelable.
Les signes les plus encourageants viennent cependant de Chine, devenue
le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre. Sa consommation
frénétique de charbon lors de la dernière décennie donne de sérieux
signes de faiblesse. Elle a ainsi baissé de 3,7 % en 2015 et même
de 10 % au premier semestre 2016. « Le ralentissement de la
croissance chinoise ne peut pas expliquer à lui seul une telle chute en
2016 », assure Pascal Canfin. Confrontée à une pollution
atmosphérique redoutable et soucieuse de prendre des parts de marché,
la Chine investit massivement dans les énergies renouvelables.
D’après le WWF, l’industrie du charbon donne d’ailleurs des signes de
faiblesse, après une décennie de forte croissance. Or le charbon est
l’énergie fossile qui émet le plus de CO2 relativement à la quantité
d’énergie produite
La mobilité, grand défi à venir
En 2016, le géant américain Peabody Energy, première entreprise
charbonnière mondiale, a déposé le bilan. En Australie, 33 % des
mines de charbon de la région du Queensland sont en perte de vitesse.
« Depuis 2010, deux projets sur trois de construction de centrales
à charbon ont été mis en arrêt ou complètement abandonnés »,
souligne l’ONG.
« Tout cela n’est qu’un début mais la transition est bel et bien
engagée, rappelle Pascal Canfin. Reste à faire évoluer le cadre de
pensée des décideurs qui reste fixé sur le monde d’hier. »
Si les signaux en provenance du secteur électrique sont très
encourageants, l’autre grand domaine de consommation énergétique, celui
de la mobilité, n’a pas encore amorcé sa mue. Automobiles, camions,
avions fonctionnent encore largement au pétrole, dont les cours sont au
plus bas. Avantage, selon le WWF : certains projets d’extraction les
plus préjudiciables à l’environnement (hydrocarbures non
conventionnels, projets de forage en Arctique, etc.) sont au point
mort. Inconvénient : les consommations de carburant augmentent et avec
elles, les émissions de gaz à effet de serre. Pascal Canfin le
reconnaît : « La transition énergétique du secteur de la mobilité
est le grand défi de la décennie à venir. »
La France est très en retard sur ses objectifs
C’est encore une promesse qui risque ne pas être tenue. La France s’est
engagée à ce que les énergies renouvelables représentent 23 % de
la consommation finale brute d’énergie en 2020. On en est très loin.
Elles n’ont représenté que 14,9 % en 2015, selon une étude du
ministère publiée en août.
La tendance n’est pas à l’amélioration. La part des énergies
renouvelables n’a progressé que de seulement 0,4 % l’an dernier,
grâce notamment à une moindre consommation du fait de la douceur du
climat.
En matière d’électricité verte, seule la filière photovoltaïque atteint
l’objectif fixé. Dans l’éolien, en revanche, les retards s’accumulent.
Pour être dans les clous en 2020, il faudrait ainsi doubler le nombre
d’éoliennes.
12 Septembre 2016
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