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La Grèce sort officiellement de sa mise sous tutelle
LE MONDE | 20.08.2018 à 05h44 • Mis à jour le 20.08.2018 à 08h21
Le
pays émerge, lundi, du troisième des plans d’aide sous lesquels elle
vivait depuis 2010, sans pour autant en avoir tout à fait terminé avec
l’austérité.
Longtemps
bannie du marché obligataire et soumise à des années d’austérité, la
Grèce sort officiellement ce lundi 20 août de son troisième
– et dernier – plan de renflouement financier, d’un montant
de 86 milliards d’euros. Le pays a, désormais, l’espoir de pouvoir
de nouveau se financer à terme sur les marchés.
La Grèce a reçu au total 260 milliards d’euros d’aide financière
depuis avril 2010 en contrepartie d’une politique d’austérité
drastique. Après l’Irlande en 2013, l’Espagne et le Portugal
en 2014, Chypre en 2016, elle est le dernier des pays membres
de l’Union européenne à sortir de la tutelle des mémorandums
d’ajustement.
Dans un entretien publié
dimanche par le quotidien Kathimerini, le gouverneur de la banque
centrale, Yannis Stournaras, met cependant en garde contre toute remise
en cause des engagements qu’Athènes a pris auprès de ses créanciers.
« Si nous revenons sur ce que nous avons accepté, maintenant ou
dans le futur, les marchés nous abandonneront et nous ne serons plus en
mesure de refinancer dans des conditions viables les prêts arrivant à
échéance. »
Athènes s’est notamment engagé à dégager un excédent budgétaire
primaire – hors service de la dette – de 3,5 % du PIB
jusqu’en 2022 puis de 2,2 % jusqu’en 2060. Pour
faciliter son retour à l’autonomie, les ministres des finances de la
zone euro sont parvenus fin juin à un accord d’allégement de la dette,
prolongeant notamment les échéances et accordant des délais de grâce
sur un montant total d’une centaine de milliards de dollars de dettes.
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« Une surveillance renforcée »
Ce plan d’allégement est assorti d’une injection massive de liquidités,
à hauteur de quinze milliards d’euros, qui dote le Trésor grec
d’une réserve de précaution de 24 milliards d’euros, laissant
Athènes libre de retourner sur les marchés ou de puiser dans ce fonds
pour faire face à ses échéances.
Le premier ministre, Alexis Tsipras, avait alors salué un « accord
historique ». « C’est une nouvelle page pour le pays. Cela ne
signifie pas que nous devons renoncer à la voie prudente de l’équilibre
budgétaire et des réformes structurelles (…) mais que nous pouvons
renoncer à la voie épineuse des mémorandums et de l’austérité
extrême », ajoutait le quatrième des chefs de gouvernement qui se
sont succédé depuis l’éclatement de la crise.
Cette prolongation des échéances et la réserve de précaution visent à
rassurer les investisseurs sur le fait que la Grèce peut assurer le
service de sa dette sur la durée. Ce geste a été considéré comme
nécessaire dans un contexte de guerre commerciale et de montée de
l’euroscepticisme.
Klaus Regling, qui dirige le Mécanisme européen de stabilité (MES), a
rappelé que la Grèce serait placée sous « surveillance
renforcée », conformément à une décision prise par la Commission
européenne le 11 juillet pour s’assurer qu’Athènes ne revient pas
en arrière sur les réformes et sa trajectoire budgétaire.
« La Grèce est un cas unique. Elle a reçu bien plus de prêts de
notre part que tout autre pays. Aucun autre pays sous programme n’a
reçu des sommes comparables. Par conséquent, la surveillance sera plus
serrée que dans les autres cas et prendra la forme de ce que l’on nomme
“surveillance renforcée” », dit-il dans une interview accordée au
quotidien Ethnos. Ce cadre prévoit notamment l’envoi à Athènes de
missions d’évaluation tous les trois mois « afin de recenser les
risques à un stade précoce ».
Le poids de la dette le plus lourd de la zone euro
La Grèce a basculé dans la tourmente après les élections législatives
d’octobre 2009, quand le nouveau gouvernement socialiste a révélé
que le déficit budgétaire du pays était trois fois plus élevé que les
chiffres officiels avancés par le précédent gouvernement conservateur.
Avec la crise, la Grèce a perdu un quart de sa richesse, le chômage
s’est envolé et les salaires et les retraites ont été réduits d’environ
40 %. Le poids de la dette représente aujourd’hui 180 % du
PIB, le plus lourd de toute la zone euro. Mais quelques rayons de
soleil commencent à percer à travers les nuages : l’activité
économique est en phase de reprise, à un rythme annuel de 2,3 %,
le tourisme est en plein essor et le chômage recule un peu, à
19,5 % après avoir frappé au plus haut près de 28 % de la
population active.
Le scepticisme reste, cependant, de mise, y compris au Fonds monétaire
international (FMI) qui prévoit certes une croissance de 2 % cette
année et de 2,4 % en 2019 mais note que les « risques
extérieurs et intérieurs sont orientés vers le bas ». Le FMI juge
également qu’une révision « réaliste » des objectifs
d’excédents budgétaires primaires sera nécessaire. « Je ne vois
pas de raison de jubiler à propos de la sortie du mémorandum, parce
qu’il est possible que nous allions de Charybde en Scylla »,
prévient Thanos Veremis, professeur émérite d’histoire à l’université
d’Athènes, pointant la faiblesse du pouvoir d’achat des Grecs, soumis à
une forte pression fiscale..
20 Août 2018
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