Trois propositions concrètes pour l'avenir de la zone euro
Avec EuropaNova


Les chefs d'Etat ont agi le 21 juillet en pompier. Ils ont éteint l'incendie avant qu'il ne s'embrase sur toute la zone euro. Il faut s'en féliciter. Mais la zone euro a besoin d'une architecture plus solide, car d'autres étincelles viendront fragiliser l'édifice. Des initiatives simples et structurantes peuvent être mises en œuvre rapidement. Pour être lisible de tous, il faut envisager une architecture à trois étages :

Le premier étage est le fonds de secours, celui qui permet de faire face aux crises. Celui-là vient d'être renforcé. Le Fonds européen de stabilité financière (FESF) qui vient de voir ses moyens d'action élargis est l'esquisse d'un Fonds monétaire européen. Il a les mêmes objectifs que le Fonds monétaire international. Les Etats membres de ce Fonds mettent en commun des ressources financières pour faire face à l'urgence. Les prêts sont conditionnés à la mise en œuvre d'un programme de redressement des finances publiques et de réformes structurelles.



Il faut se réjouir à ce titre que les gouvernements de la zone euro aient enfin accepté de réduire le taux de ces prêts à leur strict minimum, sans prendre de commissions (qui n'avaient aucun sens) sur le dos des gouvernements grecs, irlandais et portugais. Avec les décisions prises par les chefs d'Etat le 21 juillet, l'outil est maintenant pérenne et solide, même s'il est encore perfectible.

Les chefs d'Etat, en revanche, n'ont pas fait d'avancée sur la mise en place d'autres outils qui structurent la zone euro. Le deuxième étage, en effet, serait la mise en commun de capacités d'emprunt des Etats de la zone euro. Cet étage, qui verrait la constitution d'une Agence européenne de la dette (AED), s'inscrit dans un objectif complètement différent du premier. Le FESF emprunte lorsque l'urgence le requiert pour venir en secours à un Etat. L'AED a, elle, pour objectif d'emprunter pour faire face aux besoins courants d'emprunt des Etats.



L'intérêt d'une agence commune de la dette est avant tout de faire baisser les taux d'intérêt sur tous les emprunts souverains, quel que soit la situation des finances publiques des Etats. C'est l'un des avantages d'avoir une monnaie en commun. Pourquoi s'en passer ? Les emprunts de l'AED doivent être bien entendu plafonnés pour éviter que les Etats se sentent capables d'emprunter autant qu'ils le souhaitent.

Pour avancer rapidement dans la mise en place de cette AED, il serait possible de commencer seulement par les emprunts à court terme des Etats, qui constituent en quelque sorte leurs fonds de roulement. Sait-on, par exemple, que la Grèce emprunte toujours à 3 mois à 4 %, soit un taux trois fois plus élevé que la moyenne de la zone euro ? Lancer des "bons du Trésor" européens à moins d'un an, avec l'assistance technique de la Banque centrale européenne, serait chose facile et ne requerrait pas une lourde machine. Ces bons pourraient même être ouverts à la souscription pour tous les citoyens européens qui souhaitent investir dans un placement financier à court terme.



Le troisième étage est la mise en commun de capacités de financement de l'Europe. Il s'agit de remplir un autre objectif, celui de renforcer l'intégration économique au sein de la zone euro. Rappelons un chiffre simple : l'Allemagne exporte 40 % de ses produits au sein de la zone euro. Ainsi, plus la Grèce se porte mieux, à travers des projets communs, plus elle est intégrée, plus les exportations allemandes seront performantes. Pour cela, nul besoin de créer de nouvelles institutions, mais plutôt de renforcer les missions de la Commission européenne et de la Banque européenne d'investissement. Il suffit d'autoriser la Commission à emprunter pour financer des projets communs, par exemple en matière d'infrastructures européennes. La Commission a proposé à cet effet proposé d'émettre des "project bonds". Il n'appartient maintenant qu'aux gouvernements d'aller de l'avant. La Commission pourrait faire appel également à l'appui technique de la Banque européenne d'investissement qui finance des projets d'infrastructures Etat par Etat (mais non au niveau européen).



Enfin, pour mener à bien ces initiatives, il faut un chef d'orchestre, un ministre des finances européen, en charge de veiller à la cohérence des orientations budgétaires des Etats, d'évaluer leurs besoins financiers, de superviser l'émission des bons du Trésor européen, et d'incarner au niveau politique l'unité de la zone euro.

Au total, le pire a été évité le 21 juillet, mais la maison est encore à construire. Quelques mesures simples, compréhensibles par tous, devraient servir dès que possible au moins d'échafaudage à cette construction commune et nécessaire.
 
Septembre 2011

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