Zone euro : la reprise économique se confirme
Par Marie Charrel
Une
reprise encourageante, mais sans éclat. Le PIB de la zone euro a crû de
0,3 % au quatrième trimestre 2013, selon les chiffres publiés vendredi
14 février par Eurostat. Sur l'ensemble de l'année, il recule en
revanche de 0,4 %.
Dans
le détail, la bonne surprise est venue des Pays-Bas, où le PIB a crû de
0,7 % au quatrième trimestre 2013, signe que la reprise néerlandaise
accélère. De son côté, le PIB allemand a augmenté de 0,4 % sur la même
période, principalement grâce au dynamisme des exportations, tandis que
les stocks ont contribué négativement à l'activité. « C'est un peu
décevant, nous nous attendions à une croissance allemande plus
équilibrée sur la fin de l'année », commente Caroline Newhouse, à BNP
Paribas. Le PIB français, lui, a crû de 0,3 % sur l'année 2013. C'est
un peu mieux que prévu.
Ces chiffres encourageants confirment que la zone euro, sortie de la
récession au deuxième trimestre 2013, prend la voie d'un redressement
progressif, « même si le niveau d'avant la récession n'est pas encore
retrouvé », expliquent les économistes d'Aurel BGC. « Un niveau
d'activité encore plus faible que cinq ans auparavant signifie,
notamment, que des capacités de production inutilisées perdurent. »
LE CHÔMAGE DES JEUNES INQUIÉTANT EN ITALIE, GRÈCE ET ESPAGNE
De fait, les économistes restent prudents. Selon les prévisions du
Fonds monétaire international (FMI), le PIB de la zone euro devrait en
effet croître de 1 % seulement en 2014, contre 2,8 % aux Etats-Unis. Un
rythme insuffisant pour permettre une véritable décrue du taux de
chômage, qui devrait se stabiliser autour de 12,3 % en moyenne dans la
zone.
En la matière, la situation est particulièrement préoccupante dans les
pays périphériques, Italie, Grèce et Espagne en tête, où le taux de
chômage des moins de 25 ans dépasse toujours 40 % de la population
active.
La croissance de la zone euro peut désormais compter sur un moteur
principal : les exportations. « En 2013, l'union monétaire est devenue
largement excédentaire », rappelle Isabelle Job-Bazille, directrice des
études économiques au Crédit agricole SA.
Et cela, grâce au dynamisme des exportations allemandes, bien sûr. Mais
aussi parce que les pays du sud ont mené une politique de dévaluation
interne massive, par le gel et la baisse des salaires. Celle-ci a
permis de regonfler leur compétitivité et de limiter leurs déficits
extérieurs.
Revers de la médaille : cette dévaluation interne, en pesant sur les
salaires, a également érodé le pouvoir d'achat des ménages. Ces
derniers ont drastiquement réduit leurs achats en 2012 et 2013, et ne
recommenceront à consommer que très progressivement. « Le moteur de la
demande domestique est à plat dans la zone euro, et pour longtemps »,
résume Christian Parisot, chez Aurel BGC.
En d'autres termes, la zone euro ne peut aujourd'hui compter quasi
exclusivement que sur le moteur des exports. « Cela la rend plus
dépendante à la croissance mondiale, et donc, plus fragile et exposée
aux risques de rechute », explique Mme Job-Bazille.
Au reste, l'activité de l'union monétaire est toujours plombée par le
poids des dettes publiques et privées. Dans le sud de l'Europe, les
entreprises sont toujours en train de se désendetter. « C'est ce qui
explique la faiblesse de l'investissement et du crédit dans ces Etats
», commente Patrick Artus, de Natixis.
MENACE DE DÉFLATION
Depuis quelques semaines, nombre d'experts se demandent si le niveau
relativement élevé de l'euro – 1,37 dollar, contre 1,168 dollar lors de
sa création en 1999 – n'handicape pas lui aussi la reprise européenne.
De fait, si sur le long terme, rien n'indique que l'euro soit
surévalué, l'atonie de la croissance européenne devrait en revanche
justifier un euro temporairement plus faible.
Selon les experts de Natixis, son cours devrait normalement tourner
autour de 1,15 ou 1,20 dollar. En d'autres termes, l'euro serait
aujourd'hui surévalué de près de 20 %. « Un euro un peu plus faible
serait un bol d'air temporaire bienvenu pour certains pays », commente
Christophe Blot, à l'OFCE. « Mais pas pour tous, et il ne résoudrait
pas tous les problèmes de la zone. »
S'ajoute à cela la menace de la déflation que Christine Lagarde, la
directrice générale du FMI, qualifie « d'ogre » et qui plane toujours
sur la zone euro. Les derniers chiffres en la matière sont plutôt
inquiétants : l'inflation est tombée à 0,7 % en janvier en moyenne dans
la zone, malgré la reprise.
Selon le bulletin publié jeudi 13 février par la Banque centrale
européenne (BCE), les prévisions des économistes interrogés par
l'institution ont nettement baissé. Ceux-ci misent désormais sur une
inflation de 1,1 % en 2014, 1,4 % en 2015 et 1,7 % en 2016, bien loin
de l'objectif de 2 % de la BCE. « Les pressions pour que Mario Draghi
agisse afin de limiter les risques de déflation vont encore monter d'un
cran », prédit René Defossez, chez Natixis.
12 Mars 2014
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