Elections Européennes
L’Europe, notre avenir, plus que jamais
Par Gilles van Kote
Edito du « Monde ». Indifférence,
résignation et même hostilité : bon nombre de Français boudent l’Union
européenne (UE). Ils s’apprêteraient à manifester cet état d’esprit en
s’abstenant massivement à l’élection, dimanche 25 mai, du Parlement
européen. Si l’on croit dans l’Europe unie – et c’est l’engagement
constant du Monde depuis les débuts de la construction européenne –, on
s’affligera de cette vague d’euroscepticisme en ce début de XXIe
siècle. Car, plus que jamais, l’avenir de la France dépend de sa pleine
et entière participation au projet européen. Mais un projet rénové,
relancé.
Le
choix entre le repli national, suggéré ici ou là, et la poursuite de
cette aventure collective, souvent ingrate, qu’est la construction
européenne, n’en est pas un. Pour compter à l’heure de la
mondialisation, ère d’affrontements entre puissances économiques,
l’Europe est la voie de la France, celle qui doit lui permettre de
défendre ses intérêts et certaines de ses valeurs.
L’autre chemin, c’est celui du renoncement, d’une régression
historique, d’une négation de la France en tant que nation ambitieuse.
Ce scrutin, le huitième depuis que le Parlement européen est élu au
suffrage universel, n’échappe pas à la règle : quand ils votent, les
électeurs se prononcent davantage en fonction de considérations
intérieures que proprement « européennes ». Il y a, cependant, une
nouveauté, inquiétante : l’humeur de l’électorat n’est pas seulement à
l’indifférence à l’égard de l’UE, elle tourne bien souvent au rejet.
Incapables de tenir un discours positif sur l’Europe, les partis de
gouvernement sont en partie responsables de cet état d’esprit. Les
formations protestataires, elles, s’en nourrissent. Elles imputent à
l’Europe ou à l’euro – voire aux deux à la fois – la responsabilité des
maux, très réels, dont souffre le pays : chômage, croissance anémique,
difficulté d’intégration des immigrés. Leur diagnostic est faux.
Ces difficultés ne sont pas l’apanage de l’Union, facile bouc
émissaire. De même que l’austérité budgétaire n’est pas l’apanage de
l’euro : on l’applique à Washington et à Londres, par exemple, avec
encore plus de brutalité. Elle est le fait de gouvernements qui
estiment, à tort ou à raison, que le niveau de leur endettement est un
frein à la croissance.
Les griefs des électeurs tiennent au chambardement qu’est la
mondialisation, ce tremblement de terre qui modifie radicalement la
répartition planétaire de la richesse et du pouvoir. Ce n’est pourtant
pas au nom d’une idéologie libérale que lui imposerait « Bruxelles »
que la France doit se réformer. C’est pour s’adapter à la
globalisation, laquelle ne va pas disparaître pour les beaux yeux de
Paris.
L’UE fonctionne mal. Mais elle a réussi beaucoup, ne serait-ce que la
paix entre ses membres. Elle doit retrouver un sens, une intention.
Elle doit peser sur la mondialisation, pour l’humaniser, la civiliser,
l’« européaniser », en se battant pour imposer des normes – sociales et
environnementales notamment.
Il lui faut, pour cela, être forte : simplifier sa gouvernance, bien
souvent illisible, mettre en place un gouvernement économique plus
avancé, assumer son ambition énergétique. Ce qui suppose d’y participer
en votant pour ceux qui veulent la construire et non la détruire.
24 Mai 2014
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