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A Versailles, Macron et Poutine brisent la glace et partagent leurs désaccords Par Pauline Théveniaud - Le Parisien - mai 2017, 7h33 | MAJ : 30 mai 2017, 17h37
Diplomatie.
C'est en grande pompe que Vladimir Poutine a été reçu lundi 29
mai à Versailles par Emmanuel Macron, une amorce de détente entre
les deux dirigeants, sans que les dossiers qui fâchent aient été
occultés.
Visage
fermé,Emmanuel Macron attend son hôte, Vladimir Poutine, dans la cour
de marbre, le cœur du château de Versailles. Juste sous les fenêtres de
la chambre des rois de France. Le président de la République l'a fait
savoir, il ne craint pas « le rapport de force ». Pas plus qu'il ne
lésine sur la mise en scène. « La magie des symboles », comme dit son
entourage. Fussent-ils considérés « comme emphatiques, un peu désuets
». Le chef de l'Etat n'a pas peur « de donner de la majesté à
l'ensemble ». Les hélicoptères vrombissent au-dessus de la place des
Armes. Le maître du Kremlin pénètre dans l'antre du Roi-Soleil.
Emmanuel Macron esquisse un sourire. Le président russe aussi. Poignée
de main franche et appuyée.
Mais « il ne s'agit pas
juste d'un moment de théâtre ». Alors, les deux présidents, accompagnés
de leurs conseillers diplomatiques et des ambassadeurs, s'engouffrent
dans le grand cabinet de Mme Victoire pour leur premier entretien.
Suit un déjeuner avec les délégations au restaurant du chef étoilé
Alain Ducasse, dans le pavillon Dufour. L'occasion d'une « discussion
extrêmement substantielle », selon l'Elysée. « C'est une démarche qui
consiste à se dire les choses, compte tenu de ce que sont nos valeurs,
et à chercher des solutions de manière pragmatique », résume la
présidence.
Les deux chefs d'Etat pénètrent ensuite
dans la galerie des Batailles. Moins prestigieuse que la galerie des
Glaces, mais tellement signifiante. La pièce a été conçue au début du
XIXe siècle en hommage à la France victorieuse. Ainsi, Macron et
Poutine tiennent leur conférence de presse commune entourés de
représentations de batailles remportées par la France, de Vercingétorix
à Napoléon.
Pas de détours, ni « de naïveté » sur les dossiers qui fâchent, au
premier rang desquels la Syrie, l'Ukraine ou la Tchétchénie. Quant au
passif de la campagne présidentielle... Les semaines précédant le
scrutin, le camp Macron a accusé Moscou de manœuvrer contre sa
candidature. Et le Kremlin a démenti toute « intention de gêner les
affaires intérieures d'un pays ». De cela, les deux chefs d'Etat ont
discuté lors d'un premier échange téléphonique mais pas hier. Pourtant,
rien n'est oublié. En témoigne la charge de Macron contre les médias
Russia Today et Sputnik, financés par Moscou, qui se sont, selon lui,
comportés « comme des organes d'influence ». A ses côtés, mine fermée,
Vladimir Poutine persiste à juger légitime d'avoir reçu la candidate du
FN, Marine Le Pen. Et balaie les soupçons de piratages venus de Russie,
contre le mouvement En Marche ! On a connu meilleurs auspices pour une
relation nouvelle... Mais pas question de s'attarder sur des questions
de « chimie personnelle ». « Quand j'ai dit les choses une fois, je
n'ai pas pour habitude d'y revenir », dit Macron, tourné vers la
perspective d'« une action commune ».
Accolade cordiale, après une discussion franche
Clou (et prétexte) de cette visite décidément tout en symboles,
l'inauguration de l'exposition « Pierre le Grand : Un tsar en France »,
qui relate la venue, il y a tout juste 300 ans, de Pierre Ier, une
figure chère à Vladimir Poutine, qui a dressé tant de ponts
diplomatiques entre la France et la Russie. « Un formidable tremplin
historique, intellectuel, culturel pour reprendre la relation », sourit
un proche de Macron. Cette exposition, les deux chefs d'Etat la
parcourent côte à côte, écoutant les explications, marquant un arrêt
devant un portrait du jeune Louis XV.
Après cinq heures ensemble, le temps est venu de se dire au revoir.
Accolades, sourires. Une ambiance cordiale, après une discussion
franche. Oui, il y a des désaccords. « Mais, s'était félicité Macron un
peu plus tôt, au moins on les a partagés. »
31 Mai 2017
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