Une étude remet en cause la fiabilité des machines à voter
Par Stéphane Foucart
Les
bureaux de vote équipés de machines à voter électroniques seraient
moins fiables que les autres. C'est le résultat, paradoxal, d'une étude
rendue publique, mardi 8 juillet, et conduite par Chantal Enguehard,
chercheuse au Laboratoire d'informatique de Nantes Atlantique
(université de Nantes). Selon ces travaux, les nombres de votes et
d'émargements –théoriquement identiques– sont différents dans 29,8 %
des bureaux de votes équipés de machines électroniques (dans lesquels
votent environ 1,5 million de Français).
Ce
type d'erreur n'apparaît que dans 5,3 % des bureaux de vote
traditionnels. Au sein des bureaux de vote fautifs, les taux d'erreurs
demeurent dans tous les cas faibles, inférieurs au pourcent. Mais ils
sont largement supérieurs dans les bureaux de vote électroniques. Par
exemple, alors qu'un taux d'erreur supérieur à 0,4 % n'est presque
jamais relevé dans les bureaux de vote traditionnels, il l'est dans
plus de 4 % des bureaux de vote électroniques. |
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Un homme montre sa carte d'identité avant de voter grâce à une machine électronique, le 29 mai à Ville-d'Avray près de Paris.
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"AUCUNE EXPLICATION SATISFAISANTE"
Pour mener ce travail, la chercheuse a analysé les procès verbaux
relatifs aux dernières élections politiques françaises de 21000 bureaux
de vote, le tiers étant équipés de machines à voter. "Pour pouvoir
comparer des communes de même taille et de même implantation
géographique, explique la chercheuse, un échantillon de 4000 bureaux a
été extrait, le tiers pourvu de machines à voter."
Afin
d'expliquer ce surplus d'erreurs, Mme Enguehard a tenté de corréler les
taux d'erreurs relevés avec la taille des bureaux de vote ou avec les
mentions, dans certains procès verbaux, d'une défiance ou d'un
mécontentement d'électeurs quant à la présence de machines dans leur
bureau de vote. En vain. D'éventuelles différences de taux d'erreurs
entre le premier et le deuxième tour d'un même scrutin ont été
cherchées, également en vain. " Nous n'avons donc aujourd'hui
aucune explication satisfaisante de ce phénomène, dit Mme Enguehard.
Nous n'avons pas pu opérer de distinction entre les différentes marques
de machines ou les différentes versions des logiciels puisque ces
informations ne sont pas consignées dans les procès verbaux."
Les
résultats de ces travaux, non encore soumis à la relecture critique
d'autres scientifiques, doivent être pris avec précaution. Ils relèvent
cependant d'un traitement de données très simples, réalisé à partir de
documents publics. L'étude doit être transmise dans les prochains jours
au ministère de l'intérieur et au Conseil constitutionnel.
Juillet 2008
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