Les 5 plus gros mensonges sur l'Afrique
Par Chawki Amari
L'Afrique
évolue plus vite que l'image que beaucoup ont d'elle. Des préjugés sur
le continent noir persistent. Démenti sur 5 idées reçues.
Tout n'est effectivement pas rose pour le grand continent noir, mais
les idées reçues restent tenaces, notamment en ce qui concerne les
conflits, la corruption ou la croissance économique, l'immigration ou
le développement.
1. L'Afrique est un continent en proie à la guerre
Faux. Avec 68 conflits actuels répertoriés dans le monde en février
2011, 27 seulement se déroulent en Afrique, contre 36 en Asie.
Les conflits sont définis sur une échelle d'intensité, de «paix
instable» à conflit à «haute intensité». Les plus hauts niveaux sont le
plus souvent situés en Asie: il y en a aujourd'hui 4, dont un seul en
Afrique (en Somalie). Idem pour les conflits de moyenne intensité (8 au
total), 2 seulement se situent en Afrique, contre 6 dans les autres
continents, Asie (Philipines), Moyen-Orient (Palestine) mais aussi en
Russie (Tchétchénie) ou au Mexique. Les territoires disputés entre 2 ou
plusieurs parties se chiffrent à 42 en Afrique, contre 68 en Asie. La
guerre n'est donc pas propre à l'Afrique et n'a pas de couleur
particulière, à part celle du sang, le rouge, la même pour tout le
monde.
2. Les migrants africains envahissent l'Europe
Faux. Sur les quelques 200 millions de migrants dans le monde, qui
vivent en dehors de leur pays de naissance, il n'y a que 15 millions
d'Africains subsahariens résidant en dehors du continent, et seul 1
africain sur 30 a choisi de vivre en France.
A l'échelle mondiale, seulement deux migrants sur cinq s'installent
dans les pays de l'OCDE, tandis que les autres vont dans les pays du
Tiers-Monde, d'Asie ou du Golfe. Pour le continent africain, les
migrations se font souvent Sud-Sud et non pas Sud-Nord. A l'exemple du
dernier conflit en date: si 20.000 Libyens ont amerri sur la petite île
italienne de Lampedusa, faisant frémir une Europe de 700 millions
d'habitants, le même nombre de Libyens est actuellement réfugié dans le
camp de Choucha, en Tunisie, pays de 10 millions d'habitants. A cela,
il faut ajouter 50.000 autres Libyens répartis dans le petit pays du
jasmin, et 350.000 subsahariens. En fait, en Afrique, les conflits ou
les problèmes économiques engendrent plus souvent des déplacements
latéraux. Des milliers de Libyens sont réfugiés en Egypte ou en
Algérie. Les populations du Darfour soudanais vont au Tchad, les
réfugiés rwandais dans les pays voisins et à Tamanrasset, ville du Sud
Algérien, où 20 nationalités africaines cohabitent, représentant 40% de
la population de la ville. Le Sénégal ou la Côte d'Ivoire accueillent
bien plus d'immigrés africains que la France, qui elle-même accueille
moins d'Africains que la Belgique par exemple, qui elle, est au bord de
la «guerre civile» —un conflit entre «blancs».
3. L'Afrique est surpeuplée
Faux. Ce n'est pas le continent le plus peuplé. Il l'est beaucoup moins
que l'Asie, avec ses 3,9 milliards d'habitants; aussi peuplé que le
continent américain (900 millions); et un peu plus que l'Europe, avec
ses 922 millions d'habitants estimés en 2005.
Car la population africaine est répartie sur une surface de 30 millions
de kilomètres carrés, soit trois fois plus que l'Europe. Il y a de la
place en Afrique, même pour les «blancs» en crise. L'Afrique est
d'ailleurs la troisième destination des Français qui s'expatrient,
après les Etats-Unis et le Proche et Moyen-Orient. Un amusant calcul
fait apparaître qu'il y aurait plus de «blancs» en Afrique que
d'Africains en Europe. En effet, les Européens sont nombreux au
Sénégal, en Côte d'Ivoire ou encore au Gabon: ils y sont 170.000,
répartis entre l'Afrique francophone (120.000), le Maghreb (50.000) et
l'Afrique non francophone (10.000). Mais que fait la police ?
4. L'Afrique est en proie à un sous-développement persistant
Faux. En dehors du Maghreb et de l'Afrique du Sud, connus pour créer de
la croissance régulière, plusieurs pays du continent obtiennent de bons
résultats économiques et les «lions africains», champions de la
croissance à deux chiffres comme le Ghana et l'Ethiopie, sont des
exemples de réussite. L'Afrique attire les investissements étrangers, à
tel point que le Fonds monétaire international (FMI) prévoit un afflux
de capitaux pour cette année 2011 et l'année prochaine.
Bien sûr, parmi les 10 pays les plus corrompus de la planète il y a 4
pays africains, mais il y a aussi 5 pays asiatiques et un pays
d'Amérique, Haïti. Pourtant, sur l'ensemble des continents, l'Afrique
est au même niveau de corruption que l'Amérique Centrale et du Sud,
ainsi que de l'Asie.
Economiquement, l’Afrique a enregistré sa plus forte croissance ces
deux dernières décennies, avec un taux de croissance du Produit
intérieur brut d’environ 5% par an en moyenne, à tel point que le
continent noir est devenu, depuis 2009, le premier partenaire
commercial de la Chine, qui y investit massivement.
Cette croissance se poursuit d'une façon continue: la Banque africaine
de développement prévoit +3,7% pour 2011, alors que la croissance
mondiale prévue par le FMI pour la même année est autour de +4%,
répartie entre +2,5% et +3% pour les Etats-Unis, autour de +1,5% pour
l'Europe (prévisions avant la crise grecque), avec un petit +1,3% pour
la France. Il n'y a pas photo, même en noir et blanc.
5. Les Africains immigrés coûtent cher à l'Etat français
Faux. Ils rapportent plus à l'Etat français qu'ils ne leur en coûtent;
les dernières études l'ont bien montré. Les immigrés, dont les
Africains (Maghreb et Afrique noire) représentent une population
de 2 millions de personnes sur 5,3 millions d'immigrés —soit la plus
forte communauté étrangère par continent— restent mal perçus.
Il y a d'abord moins d'immigrés en France qu’aux États-Unis, au Canada,
en Suède, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Espagne ou même en Italie.
De plus, l'immigration est en baisse quand on la compare aux dernières
années ou aux siècles précédents. En 2010, elle est plus basse qu'en
1920 ou qu'au début du XIXe siècle.
Surtout, l'étude conduite par le professeur Chojnicki et remise en
juillet 2010 au ministère des Affaires sociales montre que
l'immigration rapporte 12 milliards d'euros à l'Etat français (48
milliards de dépenses et 60 de recettes). Elle contredit celle menée
par Jean-Paul Gourévitch en 2008, qui faisait apparaître un solde
négatif de plus de 26 milliards d'euros pour le contribuable français
du fait de l’immigration. Comment peut-on, en deux ans, arriver à de
tels écarts ? Ce doit être ça, la magie «blanche».
Mai 2012
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