Afrique: Une victoire pour la
liberté de la presse sur le continent
Par
All Africa
Les journalistes et les défenseurs
des droits humains dans toute l'Afrique viennent de remporter une
grande victoire dans la bataille pour la liberté d'expression.
Dans un jugement historique rendu le
5 décembre, la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples a
estimé que le Burkina Faso avait violé le droit à la liberté
d'expression du journaliste burkinabé Issa Lohé Konaté. Konaté,
rédacteur-en-chef d'un hebdomadaire, a été condamné à une peine de
douze mois de prison en 2012 après avoir publié deux articles accusant
un procureur d'abus de pouvoir. Son journal a été fermé pendant six
mois, et il été condamné à payer des amendes, des dommages et des coûts
excessifs.
De l'Angola à la Tunisie et à la Somalie, les lois criminelles sur la
diffamation sont utilisées par les gouvernements pour jeter en prison
des journalistes comme Konaté qui tentent de dénoncer la corruption, de
critiquer les politiques gouvernementales et d'informer le public.
Les normes internationales relatives à la liberté d'expression
affirment que la diffamation devrait être considérée comme une question
civile, et non comme un crime passible d'emprisonnement.
Ces normes reconnaissent également que les personnalités publiques,
tout en ayant droit à la protection de leur réputation, devrait tolérer
un degré supérieur de critique que les particuliers.
Des militants réclament depuis longtemps l'abolition des lois
criminelles sur la diffamation, faisant valoir qu'elles donnent lieu à
des abus et peuvent entraîner des conséquences très sévères. Et comme
le montre une abrogation de ces lois dans un nombre croissant de pays,
ces lois ne sont pas nécessaires pour protéger les réputations.
Le jugement rendu par la Cour africaine des droits de l'homme est une
plaisante revanche pour Konaté et ses avocats de l'organisme de défense
juridiques des médias Media Legal Defence Initiative, mais sa
signification va bien au-delà du Burkina Faso.
La Cour a ordonné au Burkina Faso de modifier sa législation et les
décisions de la Cour africaine sont contraignantes pour tous les États
membres de l'Union africaine.
Prenez le cas de l' Angola, où Rafael Marques de Morais, un militant
anti-corruption éminent, a été mis en accusation dans de multiples
procès pour diffamation.
Comme dans de nombreux autres cas, les violations de droits humains et
la corruption alléguées par Marques ont été ignorées, tandis que le
gouvernement angolais préfère se consacrer à la répression de ses
articles.
Ou bien le cas du Swaziland, où le rédacteur-en-chef du journal Nation,
Bheki Makhubu, et l'avocat Thuan Maseko, spécialisé dans la défense des
droits humains, ont été emprisonnés pendant trois mois après avoir
publié deux articles de Maseko qui critiquaient le président de la Cour
suprême du Swaziland.
Par cette décision de justice, l'Afrique rejoint un nombre croissant de
pays et d'autorités internationales qui affirment que les lois
criminelles sur la diffamation ne devraient pas être instrumentalisées
pour restreindre la liberté d'expression, que les sanctions pénales, le
cas échéant, ne devraient être utilisées que dans des circonstances
extrêmes, que l'emprisonnement ne devrait jamais être une option, et
que d'autres pénalités devraient être proportionnelles.
Les gouvernements africains devraient maintenant respecter le jugement
et modifier leurs lois, abandonner les accusations en suspens pour
diffamation et libérer les personnes emprisonnées du fait de ces lois.
Il s'agirait là des meilleures nouvelles non seulement pour les
journalistes et les défenseurs des droits humains, mais aussi pour les
citoyens des pays du continent africain qui ont le droit de savoir ce
qu'il se passe dans leurs pays, et le droit d'exprimer ce qu'ils en
pensent.
14
Décembre 2014
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