Déforestation : 18 millions d’hectares de forêts perdus en 2014
Par Rémi Barroux
La
déforestation de la planète continue. Le recul de la couverture
forestière dans le monde, en 2014, correspond à deux fois la
superficie du Portugal, ou encore à celle du Cambodge ou de la Syrie,
soit plus de 18 millions d’hectares (ou
180 000 km2), selon les données de l’université du Maryland,
aux Etats-Unis, et de Google, publiées mercredi 2 septembre
par la plate-forme Global Forest Watch.
Cette
diminution des forêts (définies comme un couvert végétal d’au moins
5 mètres de haut), qui représentent un tiers de la surface émergée
de la planète, ne cesse de s’amplifier. 2014 se révèle être, à
l’exception de 2012, la plus mauvaise année depuis le début
du XXIe siècle. A chaque minute, ce sont quelque
2 400 arbres qui sont coupés. Et plus de la moitié des
hectares de forêts perdus le sont dans les pays tropicaux.
De nouvelles zones de recul apparaissent comme dans le bassin du
Mékong, principalement au Cambodge, en Afrique de l’Ouest (Sierra
Leone, Liberia, Guinée…), à Madagascar, dans la région du Gran Chaco,
en Amérique du Sud, plus particulièrement en Uruguay et au Paraguay.
« Cette nouvelle analyse indique une poussée vraiment alarmante de
la perte de forêts dans des zones auparavant négligées », estime
Nigel Sizer, directeur international du programme des forêts au World
Resources Institute (WRI). Soixante-deux pour cent de la perte de
couverture arborée en 2014 s’est faite, en zone tropicale, dans
des pays autres que le Brésil et l’Indonésie, les deux pays les plus
touchés historiquement par la déforestation ; contre 47 %
en 2001.
« Dans beaucoup de ces pays, l’accélération de la déforestation
est due aux productions de plus en plus importantes de caoutchouc, de
soja, d’huile de palme et de bœuf, analyse Nigel Sizer. Pour ralentir
cette perte de forêts, nous devons améliorer la gouvernance forestière
pour empêcher les défrichements illégaux, planifier de façon plus
équilibrée l’utilisation des terres et les demandes des grands
importateurs, pour arriver à une production de produits de base
durable. »
Sous la pression des besoins agricoles
Ce scénario d’une forêt qui recule sous la pression des besoins
agricoles se répète aussi bien en Asie, qu’en Amérique latine ou en
Afrique. Au Cambodge, par exemple, qui est le pays dans le monde où la
perte de la couverture arborée a augmenté le plus rapidement depuis
2001, ce sont les plantations de caoutchouc qui sont les principales
responsables. Une étude (avril 2015) de chercheurs danois,
allemands et américains établit une « forte corrélation »
entre la déforestation dans la région du Mékong, au Cambodge
particulièrement, et l’augmentation des prix du caoutchouc au niveau
mondial.
Au Paraguay, ce sont les cultures du soja et l’élevage de bovins qui
détruisent des forêts dont la biodiversité est très importante.
Madagascar doit sa perte de plus de 318 000 hectares,
environ 2 % de sa superficie forestière totale dans la seule année
2014, aux activités minières et à l’exploitation de bois précieux,
comme le bois de rose ou le palissandre. Quant à la production d’huile
de palme, elle continue de ravager les forêts d’Afrique de l’Ouest et
du bassin du Congo.
Ces données publiées par le Global Forest Watch sont réactualisées tous
les huit jours grâce à une surveillance des satellites du programme
Landsat développé par la NASA, permettant une résolution à
30 mètres près. Elles seront au centre des discussions
du 14e Congrès forestier mondial qui se tient à Durban, en
Afrique du Sud, du 7 au 11 septembre.
A quelques semaines de la Conférence des Nations unies sur le climat,
la COP 21, qui s’ouvrira à la fin de novembre à Paris, ces nouveaux
éléments assombrissent un tableau déjà bien noir. La maîtrise des
forêts est un élément indispensable pour atteindre les objectifs de
réduction des émissions de gaz à effet de serre. La déforestation
serait ainsi responsable de quelque 20 % des émissions de CO2.
Enfin, la FAO, l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et
l’agriculture, rappelle que 60 % des populations indigènes
dépendent presque entièrement des forêts, que 300 millions de
personnes vivent dans ou aux alentours des forêts et que plus de
1,6 milliard de personnes dépendent des forêts pour vivre.
3 Septembre 2015
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