La dépression traitée en quelques heures par la kétamine !
Par Claire Peltier
La
kétamine pourrait devenir le nouvel antidépresseur efficace et surtout
rapide. L’état dépressif serait amélioré chez des patients résistants
aux autres traitements et ce en quelques heures seulement. Trois
millions de Français en souffrent. La dépression n’est donc pas une
maladie à prendre à la légère, d'autant que beaucoup de cas ne seraient
pas diagnostiqués. Il s’agit souvent d’un trouble causé ou aggravé par
un ensemble de facteurs (psychologiques, génétiques, sociaux et
biologiques) entraînant une sévérité de la maladie plus ou moins
avancée. Il existe à l’heure actuelle des traitements
psychothérapeutiques mais aussi médicamenteux qui ont pour but de
régler les anomalies biologiques.
Les antidépresseurs agissent
principalement sur les voies nerveuses, en favorisant le cheminement
des informations nerveuses qui est en général affecté. Leur action est
donc localisée au niveau des synapses, où ils améliorent le passage des
neurotransmetteurs vers les neurones suivants. Pourtant, la majorité
d’entre eux ont un mécanisme d’action très lent et les premiers effets
ne se font ressentir qu’après plusieurs semaines ou mois de traitement.
Ils doivent également être pris de façon très régulière et sur une
longue durée pour que leurs effets soient optimaux.
Il n’est
donc pas facile de traiter les dépressions, d’autant que près de 40%
des patients ne répondent pas positivement aux traitements proposés.
Des chercheurs de l’université de Yale aux Etats-Unis ont publié dans
le journal Science leurs travaux sur une molécule prometteuse, déjà
connue, mais dont l’usage a été détourné : la kétamine.
Les synapses sont reconstruites
Cette
molécule est habituellement utilisée en anesthésie, notamment sur les
enfants et les patients dont on ne connaît pas le passif médical (les
accidentés) puisqu’elle est efficace et sans danger. La kétamine n’est
toutefois plus utilisée à grande échelle car ses effets psychotropes,
recherchés par les usagers de la kétamine comme drogue, peuvent
entraîner des visions proches des expériences de mort imminente.
D'après
les chercheurs américains, la kétamine pourrait bien devenir la
molécule miracle anti-dépression. En effet, il y a une dizaine
d’années, les chercheurs du Connecticut Mental Health Center avaient
constaté des effets positifs de la kétamine sur des patients atteints
de dépression sévère. Près de 70% des patients résistants aux autres
traitements ont vu leur état s’améliorer en seulement quelques heures.
L’administration de la kétamine, par intraveineuse sous assistance
médicale, était cependant un frein à l’utilisation de la molécule, de
même que ses effets psychotropes.
En testant la molécule sur des
rats présentant un état dépressif, les scientifiques ont montré que la
kétamine avait un effet positif sur leur comportement. L’analyse plus
précise du cerveau des rats au niveau du cortex préfrontal, a permis de
remarquer que la molécule permettait aussi la synaptogenèse, le
mécanisme responsable du rétablissement de connexions synaptiques entre
des neurones endommagés par le stress chronique. Une protéine centrale
de la synaptogenèse nommée mTOR serait fortement et rapidement activée
par la kétamine.
Ronald Duman, responsable de ces travaux
conclut que la kétamine « est comme un médicament magique : une dose
produit un effet rapide et dure pendant sept à dix jours ». La
découverte de son mécanisme d’action devrait permettre de développer
des molécules ayant un mode d’action plus précis (en ciblant peut-être
les étapes suivantes), mais tout aussi efficace.
Mai 2010
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