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L'Europe au miroir de la France
Par Gilles Marchand
Il reste un mois à la
France pour prendre la bonne décision en matière d'Europe. Il en va ni
plus ni moins que de son avenir dans les années cruciales qui
s'annonçent.
Ce
n'est pas le moment de flancher. Pas le moment de mettre pied à terre
ou de se démobiliser. Pas le moment de manquer à l'Europe qui a besoin
d'une majorité politique claire pour aller dans le sens des réformes
sociales que nous attendons tous. Il est tout de même étrange que bien
conscients des intérêts qui sont les nôtres au niveau du continent nous
prenions collectivement des décisions que nous croyons à tord aller
dans ce sens alors qu'elles vont précisément dans la direction inverse.
Il est tout de même étrange qu'un vote — que nous n'hésitons pas à
qualifier d'euro-négatif — soit considéré comme un recours, alors qu'il
risquerait d'induire une orientation politique particulièrement
contre-productive à l'échelle du pays et au delà.
C'est précisément le contraire des intérêts des français. Mais la
période actuelle est encore celle des mystifications. Appuyées sur des
considérations économiques erronées, tirant parti des difficultés que
rencontre beaucoup de nos concitoyens, on flatte chez eux la tentation
du rejet et à leur opinion chauffée à blanc on sert un discours
démagogique, caractérisé par les inepties flagrantes et les raccourcis
primaires qui tiennent lieu de programme au Front National.
Ce faisant on ment aux français en leur promettant un avenir radieux
qui se fera sans lumière et sans discernement, comme cela a toujours
été le cas dans ce parti. Loin de réaliser cette orientation
soit-disant souhaitable, on les précipitera dans la haine et le rejet
de l'autre, dans l'amoindrissement culturel et intellectuel, dans la
pauvreté induite par des décisions économiques à l'emporte pièce, dans
le recul et la privation d'une part prépondérante d'eux mêmes, devenant
tour à tour les parias d'une Europe fragilisée puis les adversaires de
leur propres intérêts et valeurs à l'intérieur d'un continent qui offre
aux perspectives nationalistes un horizon en général funeste. "Le
nationalisme, c'est la guerre". On pèse insuffisamment aujourd'hui la
portée réelle des mots prophétiques de François Mitterrand.
Dans la situation que connait l'Europe, l'euro-progressisme est la
seule voie véritablement praticable. La seule qui puisse remailler un
territoire abimé par la mondialisation, la seule qui puisse réellement
résorber nos déficits, et offrir à nos enfants les perspectives à long
terme dont ils ont besoin. Les pouvoirs de droite ont fait montre de
leur dangerosité et de leurs excès. Les libertés prises par certains
avec les principes historiques de la république sont à la frontière de
l'acceptable. Les pouvoirs d'extrême droite présentent les mêmes
caractéristiques en pire.
Le progressisme, lui, est une affirmation d'hommes et de femmes libres
dont le destin au sein de l'ensemble européen sera de faire réussir les
valeurs pour lesquelles les peuples ukrainiens ont fait le choix de se
battre, et même de mourir. Ce n'est pas rien. C'est la revendication
ultime du statut de citoyen qu'une union européenne, qui saura se
montrer généreuse envers eux, est à même de leur offrir. Il faut
entendre les leçons de Kiev. Elles confortent la vigilance et la
réactivité face à des tentatives qui visent à faire reculer ces mêmes
valeurs. Plus que jamais l'Europe a besoin d'avoir conscience du prix
que cette liberté implique, à savoir une prévention permanente contre
toutes les tentatives visant à déstabiliser cet idéal.
Aujourd'hui, une chance de refondation nous vient. Il est important que
nous sachions collectivement la saisir. Important que nous soyons
pleinement conscients des enjeux gigantesques que nous portons en tant
que force de paix, de stabilité, de prospérité et d'équilibre
environnemental. Pour ce il nous faut une prescience particulière du
monde où nous sommes, monde dangereux mais passionnant, plus ouvert
qu'on ne le croit généralement, et qui appelle de nous les réponses
indispensables que nous devons lui fournir. Nous sommes une génération
pivot. Notre rôle, finalement, se trouve renforcé par l'acuité des
problématiques auxquelles nous sommes confrontés. Il faut faire ce
travail et cela commence par user de ce vote, pour lequel nos arrière
arrière grands parents ont parfois choisi de mourir, avec discernement
en rejetant les forces obscurantistes qui se parent de nos couleurs en
attendant de nous précipiter dans une forme inadmissible de chaos
politique. Soyons clairs : la seule alternative est de sortir par le
haut de cette situation ! En d'autres termes, de voter pour l'Europe et
non contre elle, pour nous mêmes et non contre nos intérêts véritables.
23 Avril 2014
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