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Changer !
Par Gilles Marchand
Répondre point par
point au message adressé par le pays, c’est appeler à une refonte très
profonde de l’architecture et des pratiques politiques des partis de
gauche… La politique est à réinventer !
Nous
venons de vivre — en direct — une des crises le plus graves et les plus
profondes de notre histoire. Le FN est sans coup férir, devenu le
premier parti du pays. Il va envoyer à Strasbourg un tiers du
contingent des eurodéputés français. Il vient de faire rendre gorge aux
deux partis qu’ils désignaient tour à tour comme ses ennemis.
L’extrême droite triomphe. C’est le résultat d’une stratégie ancienne qui a réussi.
Mais c’est bien là une catastrophe… La France est au bord de l’abime et
il ne faut plus simplement se contenter de lui venir en aide : il faut
la sauver… Non seulement elle sera très mal défendue à Strasbourg, mais
une profonde insatisfaction a gagné le pays. Les français sont écœurés
pour des raisons parfois symétriques du spectacle politique qui
discrédite chaque jour un peu plus une classe politique étroitisée, qui
malgré la valeur réelle de certaines de ses individualités, a
collectivement une cruelle responsabilité à assumer face au spectacle
du désastre…
Quelque chose — quelque part dans la mécanique interne du pays — s’est cassé.
Le constat est grave. Le pays est sous le choc. Il faut en tirer
les conséquences. Nous courrons vers une catastrophe encore plus
grande. Il faut donc changer une pratique politique qui échoue. Une
refondaison politique générale du pays devient indispensable. Et pour
cela, le parti socialiste et les partis de gauche doivent être
profondément rénovés dans leur architecture et dans leurs pratiques,
dans leurs discours et dans la philosophie de vie qui doit les guider
vers une nouvelle phase, inédite de leur évolution. Une révolution
symbolique totale.
C’est cela, ou disparaître.
Il va falloir sortir d’une certaine prédominance du PS, pour lui
substituer une superstructure unifiée de la gauche. Nous entrons dans
une nouvelle étape de notre histoire et de la nature de la réponse que
nous serons en mesure de formuler et de traduire ensuite concrètement,
dépendra le destin collectif national. Il est urgentissime d’abattre
les cloisons, de faire massivement entrer de nouveaux acteurs,
d’associer en profondeur sans exclusive tous les citoyens qui seraient
désireux de se rapprocher et de réfléchir à de nouvelles pratiques,
repensées autour des nouvelles problématiques nationales, européennnes
ou mondiales, et qui puissent effectivement les résoudre en faisant du
pays, un nouveau champion international. Il faudra y associer toutes
les autres composantes de la gauche et des partis progressistes
quelques soient leurs orientations et leurs sensibilités propres.
L’union et l’unité de toutes les forces de gauche est la base même de
cette nouvelle architecture, qui doit être une structure décloisonnée,
presque déstructurée, même si c’est pour mieux accueillir pendant toute
la période de refonte, toutes les volontés, toutes les idées et toutes
les énergies, bien au delà des lignes traditionnelles. Des états
généraux de la gauche ne suffiront pas. Il faut une nouvelle volonté,
une nouvelle approche des pratiques, bref, une nouvelle vision de la
politique.
Le dualisme politique traditionnel serait condamné à terme, si nous ne
venions pas d’assister à son exécution par un parti d’extrême droite
qui profite de la relative passivité des partis politiques anciennement
dominants et de leur degré de respect des pratiques démocratiques
traditionnelles. Il faut une refondation politique qui suppose aussi
une refondaison démocratique. Une refondaison qui suppose d’abandonner
les clivages droite-gauche anciens, ou si jamais d’aventure nous n’en
conservions les enseignes, de faire éclater les oppositions stériles,
pour leur substituer une architecture ultra-démocratique en réseaux,
horizontale, et participative pour tous, qui fasse sa place à chacun
selon des critères de compétence, mais aussi de pertinence. Nous devons
abandonner les structures pyramidales, centralisées, paternalistes
antidémocratiques et sclérosées, de type UMP et PS mais le FN est
également concerné, parce ce parti a lui même une structure ancienne et
dépassée. Nous sommes tous coresponsables, hommes politiques, société
civile, et citoyens de l’avenir que nous devons nous forger à l’heure
où le péril est en la demeure.
Il faut établir une forme ultra-ramifiée, innervée à tous les niveaux
de décision et de réflexion d’un pouvoir qui soit refondé pour qu’il ne
soit plus impuissant, face à une réalité qui résiste, parce que le
monde a profondément changé. Si l’exercice du pouvoir est devenu si
délicat et difficile, c’est parce que les modalités de son exercice
n’ont pas évolué depuis des décennies. La société politique
traditionnelle est morte et elle continue de vivre, souvent — sinon
toujours — coupée des réalités de la vie actuelle, sur l’illusion
qu’elle entretient de son passé. Il faut se tourner résolument vers
l’avenir. L’avenir, ce n’est pas trembler de peur face aux désideratas
a priori imprévisibles des électeurs, l’avenir c’est d’associer et de
restaurer le lien de confiance avec les gens qui le souhaitent. Nous
devons associer le plus grand nombre aux décisions qui seront prises,
c’est à dire même ceux que certains croient à tord perdus à jamais. Il
faut dédiaboliser, non pas le FN — ses instances dirigeantes sont en
réalité fragiles, outrancières, xénophobes, racistes, à la limite
permanente du hors jeu — mais les français qui se sont tournés vers
elles parce que les partis traditionnels ne faisaient pas leur boulôt.
Il faut leur redonner des vraies raisons d’espérer et de se réjouir.
Répondre à leurs problèmes. Etre à leur service. Oublier notre cas
personnel pour mieux répondre aux soucis qu’ils rencontrent.
Quand les hommes politiques pratiquent la communication à outrance,
quand ils ont peur d’eux-mêmes et des autres, ils ne tardent pas à
avoir peur de leurs réactions, à vouloir plaire à tout le monde, et à
produire l’effet inverse. Il faut aller vers les gens, avoir une foi en
eux chevillée au corps, la certitude de leur intelligence collective,
leurs choix sont des choix logiques, dictées par les nécessités et le
difficultés d’un temps. Soit nous travaillons ensemble à les résoudre,
soit nous sommes collectivement condamnés à revivre une part tragique
notre histoire. Il n’y a pas vraiment de choix. Réussir n’est pas une
option. C’est un devoir absolu. Nous devons à présent nous y atteler.
Leur présenter le grand, le glorieux visage de la politique quand elle
est faite pour de bonnes raisons. Efficace, intègre, désintéressée.
C’est de l’avenir dont il est question et il se décide aujourd’hui !
25 Mai 2014
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