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Europe : Le Rêve ou le Cauchemar
Par Gilles Marchand
Entre
les aspirations des peuples et les traductions politiques que les
partis ont a offrir à l’Europe, il y a un abysse dans lequel le
continent est trop souvent tombé. Le temps de réinventer l’idée
européenne est venu.
Nous
n’avons apparemment pas tous vécu la même histoire. La mémoire, ou tout
simplement, la connaissance que vous en avons diffère selon les
individus et certains groupes sociaux. Le tissu sociétal s’est en effet
tellement délité, a tellement évolué vers un émiettement à tous les
niveaux, les médias sont tellement fragmentés en chaines contiguës, et
les réseau sociaux achèvent tellement d’éparpiller les données que
recueillent les citoyens, que la perception des choses s’est
diffractée. Même l’école subit ces soubresauts et on peut aujourd’hui
parler d’une pédagogie clanique, qui nuit aux savoirs et accentue les
croyances ou une forme de repli identitaire. Il y a une partition
intellectuelle qui s’opère et qui fait que le corps social se dégrade
en terme de partage et d’unité, même si certaines de ces
compartimentations peuvent aussi favoriser un enrichissement
intellectuel personnel. L’éducation est un acteur essentiel de la
cohésion d’une nation et on peut parler de nation européenne dans la
mesure où la souveraineté européenne et française — par exemple —
s’additionnent pour donner un plus évident face aux mouvements du
monde.
Le projet européen s’étiole.
Beaucoup de forces lui portent des coups pour tenter de le battre en
brèches. Il fâche autant qu’il peut séduire. Certaines traditions
politiques de triste mémoire cherchent à le faire échouer tant les
valeurs sur lesquelles il repose vont à l’encontre de leurs préceptes
discutables. Son ouverture au commerce, son libéralisme, parfois
exagérément porté, peut parfois créer des dégâts, voire des diktats,
notamment sociaux et environnementaux, et est donc vécu par beaucoup
comme une négation de l’humanisme qu’il devrait normalement défendre.
Il y a eu un dévoiement. Un indéniable oubli de l’essentiel. Même si
cette philosophie est plus proche d’une possible correction que ne le
sont les idéologies collectivistes. Il est important de ne jamais
baisser les bras. Faire émerger les jalons d’une pensée nouvelle est
moins directement évidente qu’il n’y parait.
L’immigration est une de ces force à l’œuvre. Elle jette des millions
de « migrants » sur les routes et à travers les mers, créant
une pression, une tension quasi mécanique qui met, d’une certaine
manière, l’Europe à l’épreuve. Ces migrations agissent comme des
révélateurs. Elles dressent les contours de caractères qui s’affirment
dans le bien comme dans le mal. On assiste à l’accentuation d’une forme
de manichéisme qui nous prive des aspects nuancés de la réalité. De
plus en plus de pseudo-penseurs s’érigent en autorités morales et on
assiste aux discours hallucinants « d’écrivains » bornés qui
prônent des retours en arrière et des grossièreté sans nom qui
devraient instantanément discréditer ceux qui les profèrent.
Or, les migrants ne sont pas coupables de ces phénomènes. Mais ils en
sont bien les victimes, les déplacés d’une logique qui a crée tant de
dérèglements qu’elle demande aujourd’hui une complète réinvention. Elle
n’est clairement pas une fatalité, mais un symptôme du dérèglement
climatique qu’une politique énergétique catastrophique, notamment, a
engendré. On rejoint par là la vision économique d’un cycle qui
s’achève actuellement. Le monde adopte un nouveau régime qui commence
seulement à faire sentir ses effets positifs. La transition énergétique
est encore trop faible, mais elle permettra de corriger beaucoup de
phénomènes, même si nous dansons actuellement au bord d’un gouffre.
Il nous faut d’urgence modifier notre comportement.
La première des choses que nous pouvons faire en tant qu’adultes et de
devenir plus conscients et mieux informés de tous les phénomènes qui
touchent nos sociétés. Pour mieux agir, pour mieux comprendre et
discerner l’endroit où se tiennent les bonnes et le mauvaises
problématiques. Savoir dans quel sens aller, dans quelle direction se
rendre pour atteindre les objectifs louables que nous pouvons viser.
Gommer les erreurs, rectifier les errements. Faire le nécessaire pour
corriger les dysfonctionnements d’un monde qui, malgré beaucoup de
réussites, se fourvoie. L’Europe est le fer de lance d’une projection
civilisationelle qui la portera dans les siècles à venir. Il est temps
de battre en brèche une idée, un début de croyance, nocif et délétère.
Notre planète n’est pas programmée pour disparaitre
Nous imaginons trop facilement la fin du monde. C’est une vieillerie de
l’histoire. Elle est aussi vieille que la mort. Elle a toujours
impressionné et parfois paralysé des peuples au point de les rendre
atone. Mais l’humain tient effectivement son destin entre ses mains. De
son attitude dépendra son salut ou pas. Comme de toute éternité. De nos
décisions actuelles dépend notre capacité à faire pencher le fléau de
la destinée du bon côté.
Le populisme, qui cherche à saper les fondements du projet européen,
tente inconsciemment de renouer avec une tradition de violence qu’il a
toujours porté. Il l’héberge comme on fait en soi grandir les fruits
amers du ressentiment. Sachons déceler les contours de cette
monstruosité qui émerge et la chasser de nos esprits, de nos pensées et
de nos choix électoraux. L’extrême-droite n’a jamais réussi quoi que ce
soit. Par contre, elle est excessivement douée pour provoquer des
catastrophes. Le fait que des périls autres se soient néanmoins peu à
peu constituées, plus lents à discerner et plus imprévisibles, a ramené
à la vie ces fauteurs de guerre. Ils ont bénéficié du flou médiatique
qui s’est peu à peu installé. Les « fake news » sont le
colostrum naturel dans lequel s’épanouissent les organismes de ce type.
L’imprécision, l’incapacité à nommer ce dont nous souffrons, assure des
saufs conduits à ces tristes sires, et ajoute au malheur du monde comme
disait Camus.
Il est grand temps de réinventer le projet européen.
L’Europe est en réalité le seul et le principal antidote de ce poison.
Elle seule peut endiguer la montée de ces destructions à venir. En
construisant, en inventant, en imaginant un avenir qui s’inspire
véritablement du meilleur de la tradition humaniste. Des valeurs de
civilisation grecques et latines. Du meilleur des civilisations
mondiales qu’elles soient arabes ou hindouistes, africaines, ou
amérindiennes. Il est possible de bâtir une synthèse intelligente du
meilleur du monde à la dimension de l’Europe et de développer pour ses
citoyens cette excellence spécifique tout en ayant une place
fondamentale au sein de la communauté internationale. Une relation et
un discours à destination du monde qui soit audible, dont la nécessité
paraisse évidente à tous. Un endroit où toutes les valeurs européennes
en termes de droits de l’homme, de respect de la vie et des femmes, de
protection de l’enfance, des animaux, de liberté de la presse, de droit
d’association, de réunion, ou d’aller et de venir, d’équilibre des
pouvoirs, etc, soient respectées.
Nous avons besoin de faire coïncider le projet à la réalité nouvelle
qui s’est petit à petit fait jour dans nos esprits. Faire le nécessaire
pour bénéficier d’une configuration sociale qui soit plus celle de
l’avenir que celle du passé comme c’est encore trop souvent le cas.
Puiser à cette source constitutionnelle et organisationnelle nouvelle.
Cela veut dire faire jouer les éléments de la modernité dans la prise
de décision. Améliorer l’éducation pour qu’elle crée des citoyens
émancipés à tous les niveaux, l’enseignement supérieur pour qu’il crée
une grande prospérité, l’innovation pour qu’elle puisse créer des
inventions décisives pour solutionner les crises qui nous viennent.
L’agriculture doit pouvoir faire sa révolution et le respect des
paysans ne doit plus être remis en cause par la distribution en
particulier.
Chacun doit vivre mieux sans handicaper le milieu.
Le mode de production doit être entièrement refondu pour correspondre
aux nécessités écologiques nouvelles. Nous devons mieux gérer les
problématiques ambiantes, et aller bien au delà de la gestion. Inventer
une philosophie de vie qui nous permette d’atteindre de nouvelles
dimensions humaines en matière de tolérance et de conscience des autres
et bâtir cette civilisation sur l’empathie, l’affection, et l’amour.
Une générosité, une bienveillance nouvelle pour autrui confronté aux
difficultés d’une époque qui aurait normalement du engendrer violence
et pénurie. Nous pouvons faire l’inverse. Nous pouvons développer un
autre monde. Retrouver le goût de l’abondance et du respect de chacun.
Cet horizon va demander une implication plus grande. Une vigilance
accrue. Mais aussi une ouverture spécifique du cœur comme de l’esprit.
C’est un nouvel homme qui doit émerger d’une telle entreprise de
régénération. Le Renouveau auquel nous aspirons. La possibilité de
vivre autrement un futur qu’il vous appartient à présent de créer.
24 Septembre 2018
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