Roms: "Un débat entre hypocrisie et
démagogie"
Par Philippe
Huguen (AFP) via CriticizeMe (Express Yourself) et L'Express
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La
question des Roms est, pour notre contributeur Benjamin Bousquet,
devenue un rituel annuel masquant les autres préoccupations des
Français. Il prône l'ouverture d'un débat sur les statistiques
ethniques.
A
l'instar du retour de la neige en janvier, la question des Roms trouve
un écho médiatique à chaque fin d'été, depuis maintenant quelques
années. Un sujet sensible pour les dirigeants politiques, tant la
pression exercée par certains lobbys ou par des chartes de droits
européennes ne cesse d'encadrer toute sortie médiatique inopinée. Sujet
d'autant plus sensible qu'il est directement lié à l'une des
inquiétudes du peuple français: celle liée à la sécurité et à
l'immigration. De Manuel Valls, ministre de l'Intérieur chargé de cette
question à ses collègues du gouvernement, les avis diffèrent. La
"question Roms" est devenue une question de société à part entière, où
les deux avis s'opposent, mais, selon moi, se défendent.
La
notion de l'humain ?
Au coeur de ce débat, on trouve la notion même de l'être humain.
Doit-on, à coups de vols charters et de démantèlement, "punir" ainsi
des minorités? Est-ce réellement "humain" d'accueillir des personnes,
tout en étant persuadés que leur mode de vie n'est en aucun cas adapté
à celui de notre pays?
En ayant la certitude que nous ne pourrons pas leur offrir travail et
logement, ne sommes-nous pas obligés de responsabiliser un tant soit
peu, leurs pays d'origine, ou règnent encore à l'heure actuelle,
racisme et préjugés à l'égard de ces populations? Les deux opinions
diffèrent, mais sont, pour moi, défendables.
La question des statistiques
ethniques
Derrière ces questions, une autre se cache: celle des statistiques
ethniques. Un débat plus général, fait d'hypocrisie et de fausse
démagogie, qui remet systématiquement en cause toute sortie médiatique
sur un sujet de ce genre. En France, en effet, les statistiques
ethniques sont formellement interdites contrairement, par exemple, à la
Grèce où ces dernières restent légales.
Le plus vieux camps de Roms détruit
Des
statistiques permettraient-elles d'appréhender certains problèmes
discriminatoires ?
Certains acteurs de la scène politique et même du monde associatif
estiment, pourtant, que la mise en place de ces statistiques
permettraient de mieux appréhender certains problèmes discriminatoires,
notamment dans le monde du travail. La mesure de ces statistiques
rencontrerait un problème de taille: le recensement ethnique devrait se
faire selon des catégories spécifiques qu'il est aujourd'hui difficile
à définir.
Pour exemple, aux USA, ce même recensement détaille déjà 130
catégories, en Grande-Bretagne, les communautés sont passées en près de
20 ans, de 15 à 30 catégories, avec notamment trois sortes de "blancs"
(Irlandais, Britanniques, et autres types européens). Le risque étant à
la fois que chacun y aille de sa manifestation et de son unicité
particulière pour mieux faire plaider sa cause, et que dans le même
temps, d'autres s'offusquent qu'on puisse ainsi mettre les gens dans
des cases.
L'Europe appelle la France à respecter ses engagements
Il n'empêche que cette interdiction ne cesse de polluer les débats
établis sur les questions d'immigration, d'intégration et, dans les cas
des Roms comme dans d'autres, de sécurité. Quand le ministre de
l'Intérieur prétend que seule une minorité de Roms veulent s'intégrer,
aucun chiffre ni données ne vient, légalement, l'appuyer. Dans un autre
cas de figure, certains cas de discrimination à l'embauche pourraient
être réévalués grâce à cette nouvelle législation.
Les responsables de Cultes en France appellent à la Fraternité envers
les Roms
Inquiétude
numéro 1 ? L'économie
La question est de taille: faut-il légaliser les statistiques ethniques
au risque de s'exposer à une société surveillée, où les méthodes
décriées de la NSA et des services de surveillances américaines, au
mois de juin, sembleront subitement plus familières, ou vaut-il mieux
rester bloqués dans des débats hypocrites ?
Le flou dans les directives des dirigeants politiques en place sur le
dossier des Roms ne cesse d'alimenter ce débat. Un débat devenu un
rituel annuel, masquant une fois de plus d'autres sujets d'actualités
préoccupants. L'inquiétude numéro une des Français restant, quoiqu'on
en dise, les questions économiques et l'assurance, pour les 3 millions
de chômeurs, de trouver, un jour, un emploi. La "cohésion sociale" et
l'assurance de pouvoir définir librement son identité sociale sont en
contrepartie des arguments pour l'opposition à cette éventuelle
législation.
1er
Octobre 2013
MI
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