L'Europe en ligne pour sa bibliothèque
Par Bruno MASI



Le président du Conseil européen s'est dit favorable à la création d'une bibliothèque numérique, en parallèle au projet polémique de Google.


Le projet de bibliothèque numérique a trouvé son plus fidèle soutien : Jean-Claude Juncker, Premier ministre luxembourgeois et actuel président du Conseil européen. Lors de son allocution, qui ouvrait hier la deuxième journée des Rencontres européennes de la culture à la Comédie-Française, le dirigeant européen s'est engagé en faveur d'une hausse du budget culturel européen, pour qu'il sorte de «sa médiocrité et de son insignifiance» , et a prononcé un oui franc à la création d'une bibliothèque européenne en ligne. Lundi déjà, Jacques Chirac, lors de son discours à l'Elysée, avait ouvert la voie en soulignant «la profonde richesse des bibliothèques et le savoir-faire technologique que possèdent les Européens pour la numérisation des oeuvres» , avant d'assurer que l'Union européenne s'était «saisie» du dossier.

L'idée est née de la crainte de voir Google seul sur le terrain de la numérisation éditoriale. En annonçant la mise en ligne d'ici à dix ans de 15 millions de livres (environ 4,5 milliards de pages) via sa filiale Google Print, le géant américain a fait polémique. En janvier, Jean-Noël Jeanneney, président de la Bibliothèque nationale de France, lançait un appel aux bibliothèques nationales européennes pour qu'une alternative voie le jour. La semaine dernière, dix-neuf d'entre elles se déclaraient prêtes à collaborer et les chefs de gouvernement de six pays européens (France, Pologne, Allemagne, Italie, Espagne et Hongrie) demandaient le lancement d'une bibliothèque numérique européenne.

L'affaire prend donc tournure. Et Jean-Noël Jeanneney de ressentir «un mélange de satisfaction et de préoccupation. Quand j'ai lancé cet appel en janvier, je ne pensais pas que l'idée aboutirait en quelques semaines. Il faut maintenant se mettre au travail et réfléchir à ce que l'on veut mettre en place. Il faut préciser la nature des institutions qui vont se charger du dossier et s'interroger sur les moyens techniques nécessaires. Il faut que la Commission européenne ainsi que le Parlement s'engagent désormais. C'est une nouvelle étape et il ne faut pas laisser la flamme s'éteindre» .

Quant à l'idée d'une collaboration directe avec Google, comme le suggère Nikesh Arora, responsable de Google pour l'Europe (lire ci-dessous), Jeanneney n'y semble pas hostile, à condition que «de telles négociations s'établissent de puissance à puissance. Pour cela, il faut se doter d'un outil qui réponde à l'ambition européenne telle qu'exprimée ces derniers jours» . La guerre entre le moteur de recherche américain et les bibliothèques européennes n'aura peut-être pas lieu. Quoique.

Quand Jeanneney défie Google

La nécessaire création d'une bibliothèque virtuelle européenne

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